Elle est capable de tout jouer, de Miss Météo à Molly Bloom. En nous donnant ces cinq titres, cette passionnée de la vie a découvert qu’ils avaient tous en commun l’amour…
Je l’ai lu peu de temps après ma rencontre avec L’amant, dans les années 1980. C’est une (autre) histoire d’amour impossible entre un pauvre poète et une femme magnifique qui finira par épouser un riche médecin. Ce qui n’empêchera pas le premier de continuer à l’attendre sa vie entière. Je me souviens d’avoir dévoré ce livre de Gabriel Garcia Marquez, à l’ambiance exotique et surannée et où le choléra est une métaphore de la maladie d’aimer. Un début peut-être un peu lent, mais une fin si forte qu’il vaut la peine de tenir bon.
J’aime Marguerite Duras. J’y reviens toujours et j’y retournerai souvent. Pour l’atmosphère envoûtante de ses bouquins d’abord, puis pour le mystère de son écriture tout simplement sublime. Sur ce plan, L’amant, cette histoire de jeune fille qui offre sa virginité à un homme riche et plus âgé sur fond d’Indochine française, reste sûrement son livre le plus accessible. J’avais 20 ans lorsque je l’ai lu pour la première fois et je me rappelle avoir beaucoup pleuré à la fin, lorsqu’on découvre que, bien des années plus tard, l’amant l’aime encore.
J’ai lu Madame Bovary trois fois à des âges différents. C’est le récit fascinant de la descente aux enfers d’une femme qui se meurt d’ennui. Et on la comprend très bien de vouloir fuir son mari sans envergure et ses amants qui la méprisent. Emma Bovary, de par sa vision quelque peu chimérique de la vie, est un personnage complexe. Et que dire de cette scène où elle s’empoisonne, qui s’étale sur de longues pages… sinon que Gustave Flaubert, par l’acuité de son écriture, a le talent de nous faire passer par toute la gamme des émotions.
Ce roman à l’écriture magistrale de Marie NDiaye trace le portrait de trois femmes au cœur de situations complexes. La première laisse la vie parisienne pour vivre des retrouvailles difficiles avec son père, en Afrique. La seconde quitte le Sénégal pour suivre son mari en France, où elle se morfondra. La troisième s’enlise dans l’enfer de la clandestinité en cherchant à fuir la pauvreté du continent africain. La force de ces trois femmes qui savent conserver leur dignité malgré les épreuves est illustrée avec une subtilité inouïe.
J’ai tout lu de Raymond Carver. Son style est si épuré que certains le surnomment le Tchekhov américain. Ses nouvelles dépeignent l’Amérique profonde à travers l’existence de personnages cabossés par la vie, qui en arrachent avec les problèmes du quotidien : pauvreté, alcoolisme, rêves brisés… Je comprends pourquoi un grand réalisateur comme Robert Altman a voulu l’adapter au cinéma (Short Cuts, 1993), ne serait-ce que pour la manière profondément humaniste dont Carver raconte la détresse des gens ordinaires.
La comédienne et animatrice a été marquée par deux classiques, mais ce sont les mots d’auteurs québécois qui lui ont apporté du réconfort après la mort de sa mère.
Quand ma mère est décédée, ç’a été une grande perte, et on dirait que j’ai eu besoin de perpétuer sa place, son rôle. Je suis tombée sur ce titre de Francine Ruel, qui m’a charmée. Ce n’est pas que sa maman ressemblait à la mienne, pas du tout, mais ça m’a fait tellement de bien de lire sur la relation mère-fille. Même si ma mère n’est plus là, je lui écris encore – et beaucoup.
La mère de Robert Lalonde était un personnage incroyable, une grande tragédienne, un peu à la Joan Crawford. C’est du moins ce qui transparaît dans son récit, qui aborde le rapport mère-fils. J’ai moi aussi un fils, et j’avais besoin d’entendre un gars parler de sa mère. Robert a accompagné la sienne jusqu’à la fin. Savoureux.
Ginette Achim, mon agente, m’avait offert cet ouvrage de James Redfield, dont j’ai souligné de grands passages au marqueur fluo. Il contient neuf clés, neuf enseignements sur la vie, sur le rôle qu’on a face à toute chose, et que toute chose a face à nous. C’est l’un des textes qui m’ont le plus parlé jusqu’ici. Il traite de l’importance de prendre soin de l’environnement, des animaux, des humains, de l’amour… C’est exceptionnel.
Romancière et poète, Louise Dupré a aussi écrit pour le théâtre. Le récit qu’elle fait du départ de sa mère est tout en dentelle, on y sent une infinie tendresse. Ma mère prenait beaucoup de place dans mon existence, et pour les bonnes raisons. Les 10 dernières années de sa vie, nous avons habité l’une en face de l’autre. Nous étions très liées, presque siamoises. Quand elle est partie, j’ai éprouvé une soif de lire sur le vide et le vertige liés au deuil. Ce livre est l’un des trois titres qui m’ont vraiment fait du bien.
Ai-je besoin de résumer l’histoire ? C’est un livre important, qui devrait se trouver dans la bibliothèque de tout le monde. Je le relis régulièrement, et c’est étonnant à quel point on va plus loin dans les couches de sens à mesure qu’on vieillit. Une leçon de vie toute simple, pleine de naïveté, mais ô combien profonde, que nous a livrée Antoine de Saint-Exupéry.
Ce polar est un vrai page-turner. J’aime la description qu’on y fait de Los Angeles. Je lis beaucoup avant de me coucher et il y a toujours un bouquin de Michael Connelly sur ma table de chevet. J’ai longtemps couvert les faits divers. J’avais des contacts au SPVM. Je ne me tannais pas d’entendre les récits des policiers. Comme Connelly est un ancien chroniqueur judiciaire, il comprend les rouages du métier, les liens entre les journalistes et la police, la manipulation dans les enquêtes et la fabrication d’une nouvelle.
Le seul livre que j’ai lu deux fois. La première à l’université. Mais j’ai été si époustouflé par l’écriture que je l’ai relu, quelques années plus tard, pour analyser la façon de rédiger et de décrire les odeurs de Patrick Süskind. On sent la puanteur des rues du Paris du 18e siècle. L’auteur sollicite nos sens, il crée des images fortes. C’est un roman puissant.
Je tripe sur la bande dessinée québécoise, et j’ai lu tous les Paul. Les souvenirs d’enfance de Michel Rabagliati ressemblent aux miens. Il y a un mélange de tendresse, d’humour et de nostalgie qui se dégage de Paul à Québec. Ce n’est pas facile de parler de la mort, encore moins dans une bédé. Ici, c’est fait avec délicatesse.
J’aime l’idée de résurrection de ce roman, même si on est horrifié par le comportement diabolique des ressuscités. La description de l’accident dans lequel le petit Gage meurt m’a traumatisé. J’ai tout lu de Stephen King. Il représente un pan de mon adolescence. Je travaillais alors comme agent de sécurité dans un abattoir. Je lisais ses romans… et j’avais la chienne lors de mes rondes d’un frigo à l’autre en voyant les carcasses de cochons suspendues !
C’est le livre qui m’a le plus marqué. Je l’ai lu à la fin du secondaire à la bibliothèque de l’école, le midi. Je mangeais vite et j’allais le dévorer. Je suis resté accroché au fait que Jack Kerouac écrivait sur de longs rouleaux de papier. On le sent par l’énergie brute de sa prose. J’ai aussi été interpellé par le mouvement de la Beat Generation, le désir d’aventures, les marginaux de la société. Cette lecture m’a poussé, des années plus tard, à partir avec un ami sur la côte ouest américaine.
La chroniqueuse à Indice UV, également jeune maman et passionnée de bouffe, trouve tout de même le temps de lire.
C’est l’autofiction d’une chef new-yorkaise, propriétaire du resto Prune. On a eu droit à beaucoup de témoignages de chefs masculins après que Anthony Bourdain eut parti le bal, il y a une dizaine d’années. Gabrielle Hamilton nous donne la perspective féminine. C’est une fille tough mais sensible. Elle raconte son parcours, sa relation avec ses enfants, ses amours bisexuelles,
ses liens avec l’Italie, puisqu’elle a épousé un médecin italien. C’est comme un anti-Mange, prie, aime, que j’ai haï, d’ailleurs !
J’ai d’abord lu la version originale de ce livre (The Book of Negroes), au moment où j’ai participé au Combat des livres (CBC). Cette fiction historique lève le voile sur une partie méconnue de l’histoire canadienne : l’arrivée au Québec et en Nouvelle-Écosse d’environ 3 000 loyalistes noirs américains au lendemain de la guerre d’Indépendance. À 11 ans, Animata est arrachée à sa famille, au Mali, par des trafiquants d’esclaves et emmenée en Amérique. Elle réussit un jour à s’enfuir à New York, où elle entend parler de la Nouvelle-Écosse comme d’un refuge. Mais quand elle y arrive, elle redevient esclave. L’auteur canadien Lawrence Hill s’est appuyé sur des faits pour construire son récit. C’est un livre puissant, immense, par moments très dur, mais lumineux aussi. Une lecture essentielle.
Les mémoires de Barbara Walters. Certains diront, et je suis de cet avis, qu’elle est la femme la plus importante de l’histoire de la télé. Première chef d’antenne féminine, elle a dû faire ses preuves avant d’arriver sur les ondes, à 36 ans. Elle a interviewé Fidel Castro, Frank Sinatra, huit présidents américains, a couvert des zones de guerre. C’est une mère aussi. J’ai tiré beaucoup d’inspiration de ce livre, qui est en même temps une leçon d’histoire.
J’avais 14 ans. Dans la bibliothèque familiale, la couverture en aquarelle de ce bouquin m’avait intriguée, de même que la première phrase : « Aujourd’hui, maman est morte. » C’était l’époque où je commençais à m’intéresser à la musique, et
je tripais sur The Cure, qui venait de lancer une chanson au titre controversé, Killing an Arab. Chaque cassette venait avec un autocollant expliquant que ce titre n’était pas raciste, mais que c’était une interprétation de L’étranger, d’Albert Camus.
Ça m’a décidée à le lire. On y parle de rapport à la mort, de compassion, de sentiments qu’on a ou non envers sa famille.
J’ai découvert Boris Vian en deux temps. D’abord en voyage avec mes parents à La Nouvelle-Orléans, où je suis devenue folle de jazz. Puis, dans la foulée, j’ai découvert plein de chansonniers français, dont Brel, Gainsbourg et Vian, qui est en quelque sorte l’ancêtre du rock en France. C’est ce qui m’a poussée vers L’écume des jours. C’était très adolescent comme univers et, à 17 ans, tu veux encore croire au fantastique et à l’imaginaire.
Des nouvelles de notre Dodo nationale qui va très bien et lit beaucoup!
J’ai découvert Frédéric Beigbeder avec ce livre qui parle d’un publicitaire – ce qu’il a été. Je l’ai rencontré une fois, mais il y avait beaucoup de monde et il ne se souvient sans doute pas de moi. C’est un fou merveilleux et d’une très grande franchise. Les gars ne disent généralement pas ces choses-là, par exemple que L’amour dure trois ans, un autre de ses romans. Et il a raison. J’aime la vie de couple, et je ne sais pas pourquoi mes histoires d’amour n’ont pas duré. C’est peut-être moi qui étais un peu « boss des bécosses ». Je suis très ordonnée, ça peut énerver. Même moi, ça m’énerve.
C’est l’édition originale, parue juste après la guerre. Un cadeau reçu il y a longtemps et que j’ai conservé précieusement. Je passe mon temps à le relire. Je connaissais déjà le théâtre de Sacha Guitry. Dans ce livre, il fait vivre le Paris des années 1940. Il me fait rire avec ses mots d’esprit : « Les femmes, on les a dans ses bras – puis un jour sur les bras – et bientôt sur le dos », « Ne faites jamais l’amour le samedi soir car, s’il pleut le dimanche, vous ne saurez plus quoi faire. » Il y en a tant…
« On peut faire le Bye-Bye plusieurs fois aussi », a écrit en dédicace mon ami Stéphane Laporte, qui m’a donné cet essai au cours d’une période très difficile de mes traitements. Quand j’ai lu David Servan-Schreiber, j’ai compris pourquoi mon médecin me disait de me reposer. Lui ne s’est pas épargné et, quand son cancer est revenu, il s’est dit : « C’est terrible, je ne pourrai pas voir mes enfants grandir. » Je le recommande aux gens qui ont le cancer ou une maladie grave.
Je cours les antiquaires – mon père en était un – et c’est dans une de ces boutiques que j’ai acheté ce livre de Jules Renard, dans lequel il raconte sa vie et la société du Paris de son temps. Il était philosophe à sa manière : « Avons-nous une destinée ? Sommes-nous libres ? Quel ennui de ne pas savoir ! Quels ennuis si l’on savait ! » C’est très français et moi ça me plaît.
Bizarrement, j’ai eu plusieurs amants français et un seul gars d’ici, Camille Henry, un joueur de hockey. Je pognais pas avec les Québécois. [rires]
J’aime les biographies. Celle qu’a écrite Susan Butler, par exemple, sur la vie d’Amelia Earhart. Je connaissais son nom, souvent rencontré quand on lit sur l’histoire de l’aviation – comme je l’ai fait, ayant beaucoup volé dans les petits avions d’amis ou de chums. À une époque – les années 1920 – où les femmes devaient se contenter de laver la vaisselle et d’élever les enfants, Amelia pilotait des avions au-dessus des océans. J’ai lu cette bio en version originale. J’ai appris l’anglais au sanatorium où j’ai passé plusieurs mois vers six, sept ans, avec Chris, une fillette qui souffrait comme moi de tuberculose.
En fouillant dans sa mémoire pour retrouver les cinq livres qui l’ont le plus marquée, l’actrice Sylvie Moreau a découvert leur point commun : « Des personnages fascinants, empreints d’une profonde humanité. »
Je suis entrée dans l’œuvre de Simone de Beauvoir grâce à Sartre, dont j’avais tout lu au cégep. Mais j’ai flushé Sartre en rencontrant Beauvoir. Parce que lui expose sa théorie philosophique de l’existence, alors qu’elle met la sienne en pratique. Mémoires d’une jeune fille rangée est le premier de ses six récits autobiographiques, qui m’ont tous façonnée, chacun à leur manière. Car c’est Beauvoir qui m’a appris à être une femme affirmée, amoureuse, engagée et vivante.
J’ai lu ce livre à Strasbourg, en France, en janvier 1984. J’étais partie un an en Europe pour me retrouver seule pour la première fois de ma vie. Je connaissais déjà l’auteur italien Italo Calvino, mais Le baron perché, avec son imaginaire débridé, a été une révélation. L’histoire ? C’est celle de Côme, un petit garçon qui décide de grimper dans un arbre pour ne plus jamais en redescendre, afin de défendre sa vision de la liberté. Ce livre m’a inculqué la notion de liberté. Dans la tête pour commencer, puis dans la vie.
C’est mon ami Réal Bossé, accro de science-fiction, qui m’a fait découvrir cette fresque d’anticipation en quatre tomes qui se déroule sur des planètes différentes. Elle met en scène sept pèlerins appelés à sauver l’Univers. Les cantos d’Hypérion, c’est d’abord une métaphore exceptionnelle sur le côté destructeur des humains. Une œuvre débordante d’imagination dans laquelle Dan Simmons a inventé des mondes fictifs habités par des personnages incroyablement complexes, mais auxquels on adhère entièrement.
Je me suis intéressée à cette œuvre à l’époque où j’avais l’impression de négliger la littérature américaine. C’est l’histoire d’un homme qui revient au pays avec sa fille après une longue absence. Un livre sur le deuil et les souvenirs, articulé autour de héros qui cherchent à se réconcilier avec leur passé chaotique. C’est une saga aux mille ramifications. Pat Conroy a ce grand talent de rendre l’atmosphère palpable. Dans Beach Music, on ressent les émotions des personnages. On voit et on sent la mer.
Cette œuvre introspective en sept tomes sur la mémoire, l’art et le temps a changé ma perception de moi-même et des autres. On y suit depuis l’enfance un narrateur sans nom qui nous raconte sa vie et nous donne un accès privilégié à l’intériorité des êtres. À la recherche… est un incroyable microscope braqué sur les émotions. Une analyse subtile de nos failles. Un kaléidoscope humain à travers lequel Marcel Proust, avec humour et ironie, révèle le pathétique et l’émouvant.
Il se décrit comme un obsessif : quand il aime, il aime beaucoup, veut tout savoir, tout lire, tout… voir. Voir, comme le titre de l’excellente émission culturelle à Télé-Québec dont il reprend l’animation cet automne pour la cinquième année.
Un ami au cégep n’arrêtait pas d’en parler. On suit la vie d’un gars de la banlieue québécoise de 1963 à 1980. Le roman est divisé en six parties, qui correspondent à six morts célèbres : celles de John F. Kennedy, Che Guevara, Bob Marley… En même temps, c’est l’histoire du héros, du primaire au secondaire, ses premières amours… On le voit qui embarque dans le mouvement nationaliste. À la fin, le gars est dans la trentaine. Une petite leçon de culture pop. J’aurais aimé que l’auteur, François Gravel, écrive la suite.
Holden Caulfield, un jeune des années 1950, mal dans sa peau, quitte la Pennsylvanie et passe trois jours à New York, fait des mauvais coups, se retrouve au Musée d’histoire naturelle, boit. Pas un New York de carte postale, mais une métropole sale, vraie. J’ai lu le roman de J.D. Salinger à l’adolescence, quand tu te demandes qui tu es, où tu vas. Je l’ai découvert en lisant une bio de John Lennon. On y disait que son assassin avait ce livre sur lui et que, quand les policiers l’ont interrogé, il a répondu : « Ce que j’ai à dire est là-dedans. » Je voulais savoir quoi.
Le roman comme le film qu’on en a tiré sont ce que j’ai lu et vu de plus épeurant. Plus encore que L’exorciste. Un chef-d’œuvre du macabre. Une famille de Chicago déménage dans le Maine, dans une maison construite près d’un vieux cimetière amérindien qui a la particularité de ressusciter ceux qui y sont inhumés. Quand le chat meurt écrasé, le père décide de le faire revivre en l’enterrant là. C’est le début d’une spirale infernale. La force de Stephen King, ce sont ses personnages, et sur ce plan, c’est peut-être son meilleur roman, le plus fin.
Une lecture obligatoire au secondaire et un coup de foudre. J’ai acheté les disques de Boris Vian, dévoré tous ses livres à partir de celui-là, l’un des grands romans du 20e siècle. Et aussi l’un des plus absurdes que j’ai lus. Un homme tombe amoureux d’une femme qui a une maladie : un nénuphar lui pousse sur un poumon. Il va s’occuper d’elle, ils vont vivre toutes sortes de malheurs, et plus ça va mal, plus leur maison rétrécit. Un livre inadaptable. Seul le réalisateur Michel Gondry pouvait s’y risquer. Je n’ai toujours pas vu le résultat…
Mon dernier coup de cœur québécois, un peu en retard car il est sorti il y a deux ans. À Voir, on avait souvent parlé de Jocelyne Saucier, et c’est une auteure qui m’intriguait. En Abitibi, où on a tourné une émission l’hiver dernier, elle est devenue une fierté locale. Un roman difficile à résumer. Trois vieillards qui ont survécu à un grand feu dans le nord de l’Ontario, début 1900, vivent en ermites, parlent de la mort. Il y a là-dedans une histoire d’amour qui m’a jeté par terre, écrite avec beaucoup de sensualité. Faut que quelqu’un adapte ça au cinéma !
L’auteur des Chroniques du Plateau-Mont-Royal nous offre un livre par année, incapable de faire une « petite pause », dit-il. Au hasard la chance, qui sort en novembre, évoque les rencontres marquantes… Comme l’ont été pour lui les cinq œuvres que voici.
Surtout à cause des pages sur la guerre. Cette lutte entre les armées de Napoléon et celles du général Koutouzov racontée par Léon Tolstoï m’a passionné. La description de la traversée de la Bérézina est un de mes grands moments de lecture. Je l’ai relue des dizaines de fois. Quant à Natacha Rostov et aux deux hommes de sa vie, ils m’ont un peu énervé. J’étais sans doute trop jeune pour les grandes histoires d’amour… Mais quelle force, quel style, quel souffle ! Il faudrait peut-être que je me réconcilie avec Natacha !
En plus d’être un des plus grands romans du 20e siècle, c’est aussi celui qui m’a appris qu’on pouvait mélanger le réalisme et le fantastique, ce qui m’a permis de planifier le début des Chroniques du Plateau-Mont-Royal. Cent ans de solitude, c’est une œuvre profonde, foisonnant de personnages fabuleux, l’histoire de l’amour d’un immense écrivain, Gabriel GarcÍa Márquez, pour son pays, la Colombie. On en sort épuisé, heureux… et prêt à en recommencer la lecture !
J’ai choisi les 20 titres de cette fresque plutôt qu’un seul parce que c’est la lecture la plus excitante, la plus nourrissante qu’on puisse souhaiter à une personne qui aime les romans. On y scrute la société française sous le Second Empire dans tous ses états et toutes ses couches, des plus démunies aux plus nanties, à travers l’histoire d’une double famille, les Rougon, qui sont riches, et les Macquart, qui sont pauvres, étudiée à la loupe par Émile Zola, un géant de la littérature française.
J’ai dévoré à peu près tout Jules Verne pendant mon adolescence, mais j’ai gardé une préférence marquée pour Michel Strogoff, peut-être à cause de sa tête de cochon et de son grand respect pour sa mère. Et, comme pour tous les autres romans de cet auteur, j’ai lu avec délice les nombreuses et longues descriptions des personnages, des actions, des paysages. J’ai rêvé des steppes de Russie pendant des mois ! Je l’ai relu cette année, avec un œil différent bien sûr, mais j’ai retrouvé la joie de suivre les péripéties d’un vrai roman d’aventures.
J’avais 14 ans, nous partions, ma mère, mon père, mon frère Jacques et moi, pour la Gaspésie, et ma mère m’avait donné ce livre en disant que l’auteure était un génie et que j’étais assez vieux pour le comprendre. C’est en lisant ce roman de Gabrielle Roy que j’ai réalisé qu’on pouvait rester chez soi, décrire sa propre ville, ses petites gens et atteindre l’universel. Et se comparer aux plus grands. C’est un roman extraordinaire, un fleuron de notre littérature, une description incontournable du Montréal des années 1940.
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