Quoi retirer et récolter
Après 50 heures passées à moins de 12 °C, plus la peine de se battre pour faire pousser nos tomates. La plante redirige le sucre des fruits vers ses feuilles et ses racines pour lutter contre le froid. Ce mécanisme de défense nous prive alors des saveurs formidables de la tomate. Mieux vaut tout récolter, les vertes et les pas mûres ! Comme c’est un fruit climactérique, c’est-à-dire qui continue de mûrir après la récolte, il poursuivra sa maturation sur le comptoir à la chaleur, et à l’abri de la lumière.
Cueillons aussi avec délicatesse les courges d’hiver (citrouille, courge musquée et potiron). Car toute blessure favorise leur dépérissement. Un entreposage autour de 10-15 °C permettra leur conservation durant 3 à 6 mois et leurs saveurs s’en trouveront bonifiées.
Pour produire des fruits, les plantes légumières de climat chaud (aubergine, cerise de terre, courge, piment, tomate) requièrent une température variant de 16 à 26 °C. Donc même si leur floraison se poursuit une fois que le mercure descend sous ce cap, il est temps de les retirer pour nourrir notre compost.
Avec des cisailles ou une serpette, on coupe seulement la partie aérienne. On laisse les racines en terre puisqu’elles peuvent continuer d’alimenter les vers de terre et les autres micro-organismes qui décomposent la matière organique et nourrissent en retour nos plantes.
Quoi conserver
Le ménage d’automne doit être plus léger que celui du printemps. Les graines séchées de bon nombre de fleurs annuelles et vivaces (agastache, calendula, centaurée, cosmos, échinacée, monarde, phlox, rudbeckie, tagetes ou tournesol) nourriront les oiseaux en hiver.
Plusieurs légumes apprécient la fraîcheur et tolèrent le froid. Certains se bonifient même après quelques gelées. Le froid concentre, par exemple, les sucres dans les racines de la carotte, qu’on peut savourer comme des bonbons jusqu’à Noël, à condition de les couvrir d’une couche de paille.
Ces plantes comestibles peuvent aussi être cueillies tardivement sans problème :
- Les pois
- Les légumes feuilles (bette à carde, chicorée, tous les choux, cresson, épinard, oseille, poireau, mâche, roquette) et verdures asiatiques (komatsuna, mizuna, moutarde, tatsoi, yukina savoy, etc) ;
- Les légumes racines (betterave, carotte, céleri-rave, navet, panais, radis d’hiver) ;
- Les fines herbes annuelles (cerfeuil, fenouil, persil, stévia), les vivaces rustiques (ciboulette, livèche), les vivaces semi-rustiques à protéger (estragon français, origan, sarriette, sauge officinale, thym)
Quoi rentrer dans la maison
Dès que les températures chutent sous 8 °C, on met le laurier-sauce et le romarin à l’abri à l’intérieur, dans une pièce fraîche et ensoleillée. Idem pour le gingembre et le curcuma, dont le feuillage doit subir un léger gel avant d’être rabattu et de débuter son repos végétatif jusqu’au mois de mars. À moins d’être équipé d’une serre avec des lumières de croissance, je déconseille de rentrer d’autres plantes potagères et fines herbes qui survivront difficilement aux conditions hivernales de nos maisons. Tous végétaux ayant profité d’un séjour extérieur doivent être nettoyés avec un bon jet d’eau pour ne pas contaminer nos plantes d’intérieurs. On les place ensuite en quarantaine, le temps de s’assurer qu’aucun insecte ne s’y est installé.
Protéger le sol
Je conseille de recouvrir le sol et les bacs remplis de terre d’une toile d’occultation, ou d’une bâche pour éviter que la pluie ou la neige ne lessive les éléments nutritifs durant l’hiver.
Enrichir le sol de matières organiques le protégera encore plus efficacement. Pour ce faire :
- Étendre une couche de 5 à 10 cm de feuilles mortes ou de résidus de plantes vertes exempts de maladies sur le sol ;
- Ou semer des engrais verts, comme l’avoine qui est très résistante au froid et tolère bien le gel. En sachant que 2 kg couvre 100 m2, on peut acheter la quantité requise dans certaines jardineries. Les engrais verts sont des plantes servant de couvre-sol. Leur décomposition et enfouissement en surface alimentent le sol et permettent de l’ameublir, le rendant plus perméable à l’eau et à l’air.
Le compost à l’automne ou au printemps ?
Certains l’incorporent à l’automne. Attention, cet ajout est excellent pour maintenir un sol aéré, mais insuffisant pour sustenter certaines plantes potagères la saison prochaine. À l’automne, on amende avec du fumier composté, ou du compost frais, soit non décomposé. Sinon l’épandage de compost mûr se fait au printemps, à la plantation, selon les exigences nutritives de nos plantes. Lors du retour des beaux jours, il peut aussi être mélangé au vieux substrat de nos jardins en bacs pourvu qu’aucune maladie n’ait contaminé nos plantes l’an dernier.
Protection hivernale
Pas touche aux vivaces dont nous pouvons apprécier les coloris automnaux jusqu’à ce que la neige les recouvre. Leurs tiges et feuilles s’affaisseront, créant un isolant naturel bénéfique à la faune de notre jardin (soit les animaux, invertébrés, amphibiens, oiseaux qui y sont de passage). Il n’est pas interdit de prendre de l’avance pour le printemps en taillant nos vivaces à 15 cm du sol. Cette hauteur favorisera l’accumulation de neige sur nos plantes. Et c’est ce qu’on veut ! La neige, un excellent isolant thermique, les protège du froid.
Les vivaces plus fragiles tout comme l’ail peuvent être couvertes de paille ou de toiles. Autre bonne idée : enrouler des spirales de plastique autour des jeunes troncs d’arbres fruitiers afin de les protéger des rongeurs, comme les mulots.
Certaines plantes cultivées en pot peuvent résister à l’hiver dans les régions de Québec et de Montréal [zone de rusticité 4-5]. Autrement, mieux vaut les installer dans un garage chauffé.
Règles à suivre pour hiverner un jardin en pot à l’extérieur :
- Cultiver uniquement des plantes très rustiques (au moins deux zones plus froides que la zone de rusticité de la région). Par exemple, pour Montréal, situé en zone 5, on peut choisir des végétaux zonés 3, comme des amélanchiers, camérisiers et framboisiers. (Spécification : il faut comprendre que ces zones sont établies à partir de végétaux en pleine terre et que les racines de nos plantes en pot (hors terre) sont davantage exposées au froid. Elles auront ainsi plus de chance de survivre aux normales saisonnières.)
- Choisir un pot plus grand et l’isoler de l’intérieur avec du matériel spécialement conçu pour cet usage avant la plantation. Emballer le feuillage d’une toile de jute ou d’une toile isolante.
- Regrouper et coucher sur le côté les plantes en pots à l’extérieur afin de les abriter complètement sous une toile hivernale. Puis les vaporiser d’un répulsif à rongeurs à base de capsaïcine comme le produit « Fiche le camp ».
Prolonger la saison
La culture potagère en hiver gagne en popularité. Il est effectivement possible d’étirer la saison en cultivant des légumes dans une couche froide ou un tunnel non chauffé. Pour en savoir davantage, voici deux excellents ouvrages : Des légumes en hiver : produire en abondance, même sous la neige, par Eliot Coleman, le pionnier de l’agriculture hivernale dans le nord-est des États-Unis, et plus près de chez nous, Le Maraîchage nordique : découvrir la culture hivernale des légumes, par Jean-Martin Fortier et Catherine Sylvestre.
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