Blogue La course et la vie

Avoir du fun

L’orgueil n’a pas sa place à l’entraînement. L’ego non plus.

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« Moi, je suis là pour avoir du fun, pas pour la performance »!

Phrase classique post-entraînement qui a mal été, où le coureur a souffert en ayant le sentiment qu’on exigeait de lui plus que ce qu’il n’était capable de donner, et qui blâme, implicitement, ceux qui osent « performer » mieux que lui.

On l’a toutes dite, cette phrase, et sur le même ton dépité.  Je le sais, je l’ai dite.

On se sent « poche », pas à la « hauteur », reléguée au fond de la classe et obligée par notre propre incompétence à porter le bonnet d’âne (pas dans ma palette de couleur, ce maudit bonnet). C’est humiliant, ou du moins, le percevons-nous comme tel.

Ça ne devrait pas.

Je débute. Comme un enfant qui apprend à marcher, j’hésite, je trébuche, je vacille, je braille, je me décourage et j’ai peur. Toutes choses parfaitement normales en situation d’apprentissage. J’ai tout à apprendre. Donc, tout est plus ardu, difficile, épeurant. Il y aura des gaffes, des chutes, des chocs, des bleus, des révoltes  « j’y vais pas, bon, une fille a le droit d’en avoir son cass’, oui ou non » ?!  (oui, oui, t’as le droit, mets tes runnings, on est en retard), et des blessures qui font souvent plus mal à l’orgueil qu’au corps.

Justement. L’orgueil n’a pas sa place à l’entraînement. L’ego non plus.

Il n’y a pas de progrès possible sans un lâcher-prise sur ce maudit ego. T’es la dernière? Reviens-en. T’es la plus lente? Oui, pis? T’as pas de fun? Ben non, t’en as pas. Ou alors, quand une âme charitable annonce la fin de l’entraînement…  (fiou, c’est finiiiiii).

Le fun dans le sport, c’est comme l’amour, il arrive souvent tard, au moment où (bizarrement), on a enfin quitté la zone de l’ego pour entrer dans la zone de l’authenticité…

(Ici, la moitié des filles sont mortes de rires, l’autre moitié me déteste, mais bon, endurez-moi, sur la tête de mes enfants, je vous jure que sur  99,7 % des cas, c’est exactement comme ça que ça se passe).

On a la chienne jusqu’à la moelle, ça fait mal jusqu’au trognon, il faut y aller quand même. Petit à petit, avec patience et détermination. C’est la mesure de notre courage.

Éventuellement, tous ces petits apprentissages – ceux qu’on trouvait « niaiseux » et jamais assez « glorieux » – s’unissent pour monter une mayonnaise qui semble enfin vouloir prendre.

Comme une enfant qui s’élance, on se met alors à courir comme une grande, avec force et fluidité.

Fière de sa performance.

Hey, ma mayonnaise vient de pogner, ma mayonnaise vient de pogner! Whou hou!

Et cette fois-là (encore bizarrement), personne ne remet en doute le fait qu’on soit vraiment là pour avoir du fun…

***

Cette chronique est dédiée à tous ceux et celles qui débutent la course et qui sont là, à chacun des entraînements du mardi soir, parfois découragés, mais toujours valeureux. Votre courage et votre persistance m’épatent. 

Crédit : iStock

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