Blogue La course et la vie

Capable(s)

Le pouvoir diabolique d’un seul mot.

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Je me souviendrai toujours du jour où mon premier entraîneur, Stéphane (mieux connu sous le doux surnom de « Chef »), m’avait dit à la fin d’un entraînement, que j’étais capable de courir un 10 km sous la barre d’une heure.

On venait tout juste de courir 10 km, en une heure et dix (bon, quinze…) minutes. Ça m’avait pris tout mon petit change. Je l’ai regardé, hébétée. Même en mettant la tête de mon fils en péril, je ne voyais pas comment j’allais un jour pouvoir réussir cet exploit.

Ce n’était donc pas assez que je l’aie tout simplement couru, ce maudit 10 km?! Il fallait, en plus, le courir vite?!

Il riait, l’enfoiré, même pas essoufflé, même pas fatigué.  Il a alors eu cette phrase mémorable : « oui, tu pourrais continuer à « juste » le courir, mais tu es capable de plus ».

Plus?!?

Alors que j’avais l’impression d’avoir donné 110 % de mon effort?

Oui.

Shit.

Il ne me demandait pas une performance olympique pourtant (loin de là…). Son désir de me voir passer sous la barre de l’heure était réaliste, et raisonnable.

Je dis « réaliste et raisonnable » maintenant que c’est fait, mais à l’époque, je ne le voyais pas du tout comme ça. Je ne pouvais pas imaginer aller plus vite. Juste à y penser, je voulais me rouler en boule au pied de la statut de Félix Leclerc et pleurer comme une enfant. Tous mes muscles voulaient pouvoir « se contenter de juste le courir ».

J’ai dit un truc du genre « oui, mais c’est déjà beau que je le fasse, non »?

Il n’a pas été impressionné.

C’est alors qu’il m’a sorti une autre phrase mémorable : « ça va prendre du temps, mais si tu y mets les efforts, tu vas y arriver, tu en es capable ».

Capable. Encore ce maudit mot.

Istockphoto

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Ici, trois questions méritent d’être posées, et ce pour chaque coureur, peu importe son niveau. Devant un nouveau défi, ce sont toujours les mêmes questions.

Suis-je prête à accepter que ça prenne du temps?

Est-ce que j’ai envie d’y mettre les efforts?

Est-ce que ces efforts et ce temps sont au service d’un objectif qui est le mien, et pas celui de quelqu’un d’autre?

J’ai répondu « non » aux trois. C’est dire si l’athlète a parfois l’esprit rebelle.

Ça a pris du temps. Une année complète pour être exacte. Je ne vous mentirai pas. Il y a eu de ma part une forte résistance initiale à la perspective de devoir faire « plus d’effort ».

J’avais l’impression d’être un âne « bucké » des quatre pattes. Non, j’irai pas, bon.

Mais le mot « capable » flottait au-dessus de ma tête, pénétrant insidieusement ma psyché perméable.

Capable. Vraiment, Chef?

Mais oui, arrête de m’achaler avec ça, et grouille tes fesses.

J’avais tort. Chef avait raison. Comme quoi, on sous-estime très souvent de quoi on est capable, et ça prend parfois une grosse voix bourrue pour nous obliger à regarder un peu plus loin, un peu plus haut (merci Ginette Reno). De quoi on est capable, on ne le sait pas tant qu’on n’accepte pas l’invitation au voyage.

L’objectif (non olympique) a été atteint, puis, dépassé. Il me reste maintenant à courir le 10 km au même chiffre que l’âge que j’aurai en octobre, soit 52 minutes pour 52 ans.

Si j’en suis capable? Bien sûr que oui. Ça n’arrivera pas tout seul, il faudra que je sois patiente, mais j’en suis capable.

Voyez comme c’est diabolique le pouvoir d’un seul mot? Il suffit que quelqu’un nous le mette en tête pour qu’il ne veuille plus en décoller.

Et vous, de quoi êtes vous capable? Le savez-vous?

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