Psychologie

Psycho : la thérapie familiale

Quand la souffrance d’un enfant perturbe la famille ou que celle-ci est aux prises avec des conflits, la thérapie familiale offre un terrain neutre, où chacun peut s’exprimer.

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Dans le bureau de la travailleuse sociale, Maxime, sept ans, assis en retrait, s’amuse avec un camion, tandis que Patrick, neuf ans, regarde par la fenêtre. Il semble suivre les nuages, mais, tout comme son frère, il écoute son père qui parle. Maxime entre dans la conversation et donne ses impressions en jetant des coups d’œil à sa mère. La famille en est aujourd’hui à sa troisième séance de thérapie familiale.

Pierre, Chantal et leurs deux enfants menaient une vie plutôt paisible, mais, récemment, les résultats scolaires de Patrick se sont mis à friser la catastrophe et ses crises de colère à répétition ont fini par perturber le climat familial.

Paniqués, ses parents se sont d’abord renvoyé la balle, s’accusant mutuellement d’être responsables de la situation. « Tu le gâtes trop », lançait Pierre à Chantal. « Tu es trop sévère, trop exigeant », accusait Chantal. Les repas familiaux étaient silencieux ou tendus, puis les promesses de récompense et les menaces de punition se multipliaient. Chantal, voyant que Patrick restait sourd à ses appels, a décidé qu’il était temps d’agir. Elle a alors suggéré à son conjoint une thérapie familiale pour déterminer les causes véritables du problème, et surtout, trouver des solutions.

Quand rien ne va plus
Cette situation familiale n’a rien d’exceptionnel. Chaque année, des milliers de familles québécoises se retrouvent en thérapie pour résoudre des problèmes ou des conflits. Une décision qui contredit l’expression ancienne bien connue « laver son linge sale en famille », qui laisse entendre que les problèmes familiaux devraient plus ou moins rester secrets et que la famille devrait en principe résoudre elle-même ses problèmes… Mais ce n’est pas toujours aussi simple. Drogue, fugue, délinquance, divorce, échecs scolaires, crise d’adolescence, anorexie, problèmes relationnels profonds, maladie ou décès d’un des membres… La famille doit parfois faire face à des situations pénibles. Et dans ces cas, une aide extérieure pourrait être nécessaire ou salutaire pour prendre un peu de recul et se réorganiser.

Mais quand faut-il consulter? En fait, ce n’est pas tellement la gravité de la situation qui importe, mais plutôt le fait que la vie et la dynamique de la famille soient perturbées. La thérapie familiale peut être un bon outil quand il n’y a plus de communication, quand toutes les discussions débouchent sur des accrochages, quand les rapports se font violents, quand on n’a plus de plaisir à être ensemble, quand le problème d’un membre de la famille influence le bien-être de tous les autres.

Qui dit thérapie familiale dit famille
En général, c’est le comportement d’un enfant ou d’un ado qui incite les parents à consulter. Bien que ce soit plus souvent les mères qui entreprennent la démarche, les expertes consultées soutiennent que les pères sont de plus en plus impliqués et acceptent en général de participer au processus.

Comme son nom l’indique, la thérapie familiale réunit au moins deux générations dans le bureau du thérapeute. Idéalement, l’enfant visé par le problème et ses deux parents seront présents dès la première rencontre. Dans certains cas, les frères et les sœurs pourraient être invités à se joindre aux séances ultérieures, selon le problème et la dynamique familiale. Il arrive parfois qu’un des parents se présente seul à une première rencontre, histoire de savoir si la démarche est possible. Cependant, une fois ce premier contact établi, les autres membres de la famille seront impliqués. Fait à souligner, la thérapie familiale peut également être d’un précieux secours pour les familles monoparentales ou recomposées, qui sont aux prises avec des conflits de rôles ou d’interactions.

Et les enfants, qu’en disent-ils?
S’ils sont parfois intimidés, les enfants aiment ces rencontres, car ils ont la chance de s’exprimer dans un climat neutre. Selon les thérapeutes et la littérature spécialisée dans ces questions, les enfants ont souvent une perception très juste de la situation et posent d’ailleurs des questions pertinentes. De plus, ils osent parfois dire des choses au thérapeute qu’ils n’oseraient pas dire directement à leurs parents par crainte de les blesser ou de s’attirer des représailles. Quant aux parents, ils sont contents de pouvoir prendre du recul et de trouver des trucs concrets. Le climat de la thérapie familiale leur permet de laisser tomber le masque qu’ils portent parfois devant leurs enfants pour ne pas les traumatiser ou pour jouer leur « rôle de bons parents ».

Les adolescents, eux, sont parfois plus réticents à participer, et c’est souvent un seul des parents qui entreprend la première démarche. Dans ce cas, le thérapeute familial l’aidera à trouver les mots pour convaincre l’ado de venir consulter. Au besoin, le thérapeute pourrait orienter le jeune vers une démarche de thérapie individuelle, si ce dernier refuse de participer pleinement ou de parler devant ses parents. Mais, très souvent, les barrières et la résistance s’atténuent après une ou deux rencontres, et l’adolescent apprécie le fait de pouvoir s’exprimer en terrain neutre.

Quelques semaines suffisent parfois

La thérapie familiale a vu le jour dans les années 50. Elle vise à rétablir non seulement la communication, mais aussi les interactions entre les membres de la famille et le rôle respectif de chacun. En présence des enfants, le professionnel amène chacun des membres à s’exprimer et à trouver des solutions ou des moyens concrets pour régler les conflits. Les discussions permettent souvent de cerner des problèmes cachés, qui sont en fait la cause véritable du problème qui a amené la famille à consulter.

Contrairement à la thérapie individuelle, qui peut s’échelonner sur une ou plusieurs années, la thérapie familiale ne nécessite en moyenne que huit à dix rencontres hebdomadaires d’une heure (75 $ à 150 $/heure). Cela dit, selon les cas, la thérapie peut s’étendre sur quelques mois, et dans de plus rares cas, sur une année. Règle générale, le thérapeute s’accorde d’une à trois rencontres pour évaluer les véritables besoins et problèmes, puis installer le climat de confiance nécessaire à la réussite de la thérapie. Au terme de cette évaluation, s’il n’est pas en mesure d’aider la famille, il pourra, au besoin, la réorienter vers d’autres ressources (médicales, thérapies individuelles, etc.).

Thérapeute conjugal et familial : une expertise  
Depuis 2001, tous les thérapeutes familiaux doivent être membres de l’Ordre des travailleurs sociaux du Québec, dont le nom a été changé en 2009 pour l’Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec (OTSTCFQ). Les titres de thérapeute conjugal et familial, thérapeute conjugal et thérapeute familial sont donc réservés au sens des lois qui régissent les ordres professionnels au Québec.

Pour porter l’un de ces trois titres, le thérapeute doit être détenteur d’une maîtrise dans une autre discipline. Il doit aussi avoir suivi une formation théorique en thérapie conjugale ou familiale de 350 heures et une pratique supervisée en thérapie conjugale ou familiale de 500 heures.

En février 2012, on comptait 274 thérapeutes conjugaux et familiaux membres de l’Ordre. Un tiers d’entre eux sont travailleurs sociaux, un tiers sont en plus membres d’un autre ordre professionnel (médecins, psychologues, infirmiers, psychoéducateurs, etc.) et l’autre tiers détiennent une maîtrise en sciences de la santé ou de l’éducation (sexologues, professeurs).

Pour vous assurer qu’un thérapeute familial est un membre en règle de l’Ordre, vous pouvez téléphoner au 514 731-3925, au 1 888 731-9420, ou consulter le répertoire du site Internet : www.otstcfq.org.

Merci à Mme Claire Leduc, travailleuse sociale et thérapeute familiale, à Mme Geneviève Agoues, psychoéducatrice, thérapeute conjugale et familiale et psychothérapeute, de même qu’à Mme Anne-Marie Veilleux, de l’OTSTCFQ, pour leur précieuse collaboration.     

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