Ils ne paient pas de taxes… dans les magasins situés à l’intérieur des réserves. Sauf qu’il y en a très peu et qu’il faut faire ses courses ailleurs pour se procurer le minimum vital. Ceux qui ont le statut enregistré d’Indiens peuvent toujours utiliser leur carte pour se voir déduire les taxes à la caisse dans les commerces hors réserve. Mais là encore, rappelle Melissa Mollen Dupuis, cofondatrice d’Idle No More au Québec, « seuls quelques magasins acceptent la carte, et dans des régions bien définies, en fonction d’ententes ». Quant aux impôts, « seuls les autochtones vivant et travaillant à l’intérieur de leur propre communauté en sont dispensés. Or, il y a fort peu d’activité économique dans nos villages », fait valoir Ghislain Picard, chef de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador (APNQL). Les autres autochtones exemptés d’impôts sont ceux dont les revenus sont trop faibles pour être imposables, au même titre que le reste de la population.
La colonisation a eu notamment pour effet de leur retirer toute autonomie. « Les gouvernements ont mis nos communautés sous tutelle, ce qui a contribué à les marginaliser », commente Ghislain Picard. En confinant les Amérindiens dans des territoires trop restreints pour l’autosuffisance alimentaire sans leur donner les moyens de se développer, on les a placés dans une situation de dépendance. « Dans les réserves, on est en mode survie. Le seul employeur, c’est souvent le conseil de bande, lui-même sous-financé », fait observer Viviane Michel, présidente de Femmes autochtones du Québec. Heureusement, de plus en plus de communautés prennent en main leur économie, en lien avec le tourisme et les ressources naturelles.
Le budget des réserves est souvent plus important que celui des municipalités parce que les conseils de bande ont à gérer tout ce qui relève habituellement des autres paliers gouvernementaux : éducation, santé, sécurité, logement, services sociaux… « Les chefs et leurs conseillers ont des charges de travail beaucoup plus contraignantes que dans une municipalité, explique Ghislain Picard. Et les salaires très élevés ne concernent qu’une minorité de chefs. » Sont-ils corrompus ? « Certains le sont… comme dans d’autres milieux politiques », commente Melissa Mollen Dupuis. Ghislain Picard pense surtout qu’on pourrait améliorer la gouvernance dans les réserves. « Les responsabilités sont lourdes et complexes. Nous aurions besoin de plus de formation », dit-il.
Évitons de généraliser. « Le crime organisé profite de la situation géographique de certaines communautés, comme celles situées à proximité de la frontière américaine, observe Mylène Jaccoud, professeure de criminologie à l’Université de Montréal. Mais, de manière générale, ce qui touche les communautés autochtones, c’est le petit trafic de drogues. Il s’explique entre autres par la marginalisation socioéconomique des réserves, le désœuvrement de certains jeunes, et aussi, plus profondément, par le désarroi, la souffrance. »
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