Entrevues

Les confessions d’Oscar de la Renta

Châtelaine rencontrait l’homme pour une entrevue dans son numéro de mars 2003. Oscar de la Renta par lui-même…

Il a habillé les femmes les plus célèbres, les plus belles et les plus puissantes du monde : d’Hillary Clinton à Sarah Jessica Parker en passant par Beyoncé et l’une de ses premières clientes, Jackie Kennedy. Couturier prolifique, honoré à de multiples reprises de part et d’autre de l’Atlantique, Oscar de la Renta a œuvré chez Balenciaga, Lanvin, Balmain et Elizabeth Arden Couture, avant de fonder sa propre griffe basée à New York. Cet homme doué pour le bonheur aimait profondément son travail, sa famille surtout – et la Gaspésie aussi, où il passait deux semaines chaque été dans le camp de pêche de son épouse.

Le brillant créateur, un des plus grands du milieu de la mode, s’est éteint hier à l’âge de 82 ans. Pour lui rendre hommage, voici l’entrevue qu’il avait donnée à Châtelaine en 2003, lors de son passage à Montréal. Il avait été alors charmant, un vrai gentleman, simple et généreux de son temps précieux. Adieu, Oscar!

Oscar de la Renta (Photo : Jean-François Bérubé)

Oscar de la Renta (Photo : Jean-François Bérubé)

Quels furent les événements les plus marquants de votre enfance ?
Les souvenirs rattachés à ma mère. J’ai été élevé en République dominicaine, entouré de six sœurs ! Je retourne souvent là-bas, où je possède une maison de vacances et un hôtel établi dans une réserve écologique, le Punta Cana Beach Resort.

Quelle est la facette de votre travail qui vous intéresse le moins ?
De ne pas en avoir assez !

Quelle qualité essentielle voulez-vous retrouver chez vos amis ?
La confiance.

De qui êtes-vous le plus proche dans votre famille ?
Sans conteste, de ma femme et de mes quatre enfants.

Qu’est-ce qui vous motive dans la vie ?
La vie elle-même ; c’est un puissant moteur.

Quels souvenirs avez-vous de votre premier amour ?
Oh ! Que c’était le premier… (après un instant de réflexion) L’innocence, aussi.

Qu’est-ce qui vous fait vraiment peur ?
La nuit, la noirceur. J’adore la lumière, son rayonnement. C’est indispensable pour moi.

Qu’est-ce qui vous passionne en ce moment ?
La vie. Vivre. Tout simplement.

Quelle est votre définition du bonheur ?
Par définition, je suis toujours heureux. C’est l’essence même du bonheur.

Avez-vous des regrets ?
(sans hésitation) Aucun, absolument aucun.

Pensez-vous parfois à la mort ?
(très calmement, un peu songeur) Parfois, oui. Mais pas souvent.

Qu’est-ce qui vous ennuie profondément ?
De devoir être patient !

Quelle personne (morte ou vivante) détestez-vous le plus, et pourquoi ?
Aucune. Ce n’est vraiment pas dans ma nature.

Qu’est-ce qui vous met en colère ?
La bêtise.

Le don que vous voudriez posséder ?
La patience, justement.

Quelle est, selon vous, la plus grande injustice de la vie ?
La pauvreté.

Quelle est la personne vivante que vous admirez le plus, et pourquoi ?
Mon épouse, qui est extrêmement intelligente et que j’adore.

Avez-vous des auteurs préférés ? Un livre qui vous a inspiré, transporté ?
J’apprécie beaucoup Gabriel García Márquez, pour sa fantaisie mystérieuse. Je le lis en espagnol. Sinon, je suis un fan de biographies et de livres d’histoire, peu importe l’époque ou le continent.

Un désir non assouvi ?
Pas vraiment… Si ce n’est de ne pas avoir assez de temps pour accomplir tout ce que je voudrais !

Le geste le plus fou que vous ayez posé ?
Je n’ai jamais eu l’impression de poser des gestes fous ou de prendre des décisions inconsidérées. Cela dit, certains de mes gestes ont peut-être pu parfois sembler fous à mon entourage… Il est vrai, par contre, que j’ai le sens de l’aventure ; j’aime me sentir « neuf » et avoir l’impression que rien n’est impossible.

Où avez-vous été le plus heureux ?
Maintenant, dans ma vie. J’ai acquis une certaine sérénité, mais j’aurais répondu la même chose il y a 20 ans : j’ai toujours su apprécier l’instant présent.

Trois choses que vous avez accomplies dont vous êtes particulièrement fier ?
Ma famille. Mon succès et ma carrière professionnelle. Ainsi que les écoles-orphelinats que je parraine en République dominicaine. [NDLR : 1 500 enfants y ont été accueillis, pour recevoir une éducation et des soins médicaux appropriés sans être séparés de leurs familles.]

Un objet auquel vous tenez mordicus et que tout le monde trouve ridicule ?
(il cherche) Non, vraiment, je ne vois pas. Je ne suis pas très matérialiste. Je suis heureux d’être entouré de ce que j’ai, mais si tout ça devait disparaître, je m’en passerais très bien.

Quand vous vous regardez dans le miroir, que voyez-vous ?
Le fait que je vieillis. Eh oui, malgré tout, le temps passe !

La personne que vous auriez aimé interviewer, morte ou vivante ?
Il y a tant de gens que j’aimerais rencontrer, tant de cerveaux intéressants autour de moi. Mais si, toutefois, je pouvais revoir une personne disparue, je choisirais ma mère.

Quelle est votre philosophie de vie ?
Live – Love – Lava (Vivre, aimer, vibrer)

Quel autre métier auriez-vous aimé faire ?
Je suis très content du mien, même si, initialement, je suis allé étudier la peinture à l’Académie San Fernando, à Madrid. À la réflexion, j’aurais quand même bien aimé être architecte.

Si vous pouviez changer quelque chose chez vous – caractéristique physique ou de votre personnalité –, qu’est-ce que ce serait ?
(malicieusement) Une tonne de cheveux noirs et des yeux bleus !

Quelle question détestez-vous le plus vous faire poser ? Et pourquoi ?
Des questions stupides, bien entendu. Je ne trouve pas qu’il puisse y avoir de question vraiment indiscrète, seules les réponses qu’on y apporte peuvent le devenir.

Complétez la phrase : « Je serai satisfait quand… »
…quand rien du tout ! Je suis très heureux ainsi, aujourd’hui, maintenant. Je n’attends rien d’autre pour me réjouir !

Avec la collaboration de Caroline Madoux.

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