Société

J’ai changé de vie: de gérante d’artistes à journaliste d’aventure, Janylène Boucher

Bien des raisons sont bonnes pour décider de changer de vie. Pour Janylène Boucher, 47 ans, mère de trois enfants, c’est une grave maladie qui a tout déclenché. D’agente artistique, elle est devenue journaliste d’aventure. Et ne s’est jamais sentie aussi vivante!

Photo: Virginie Gosselin

Ce que je faisais avant

J’ai pratiqué mille métiers, j’ai eu mille passions. J’ai rédigé une encyclopédie sur cédérom, créé des sites web, fondé des entreprises. J’ai été chanteuse, choriste pour Céline Dion, Diane Dufresne, Jean-Pierre Ferland… Quand je suis tombée malade, j’étais gérante d’artistes. Bref, je suis une hyperactive. Et un peu fatigante!

Ce que je fais maintenant

Du journalisme ethnographique pour des publications québécoises. Depuis cinq ans, je rédige des portraits de personnes qui carburent au dépassement de soi. J’accompagne chacune d’elles dans une aventure. On partage une expérience, on passe du temps ensemble, on risque parfois notre vie ensemble.

Ce qui a tout déclenché

À 37 ans, la maladie m’a foudroyée. J’ai fait de la fièvre pendant neuf mois. Avec des douleurs intenses dans le cou. Durant plus d’un an, les médecins ont cherché la source de mon mal: j’avais 51 tumeurs logées dans la moelle osseuse, jusque dans les os de mon crâne. Je me voyais morte dans trois mois! Heureusement, les tumeurs se sont avérées bénignes. Je souffre d’hémangiomatose squelettique diffuse. La maladie est toujours là, mais les douleurs sont désormais rares. Et mes neuf mois de fièvre? Un virus que j’avais attrapé de mes chats!

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Ma descente aux enfers

Avant qu’on découvre que les tumeurs étaient bénignes, tout le monde pensait que mes jours étaient comptés. J’ai subi de nombreux traitements de chimiothérapie, avec tous les effets secondaires qui viennent avec. Pour m’aider à endurer la douleur, les médecins m’ont rapidement prescrit de la morphine. Et je suis devenue accro. C’est comme une spirale: la morphine soulage la douleur, mais le manque de morphine génère de la douleur…

Le geste qui a chamboulé ma vie

Mon quotidien était devenu un tel enfer de souffrances qu’un matin, en profonde dépression, j’ai avalé 1 000 mg de morphine. Pour en finir une fois pour toutes. Je me suis réveillée en détresse respiratoire à l’hôpital, devant un psychiatre. Le moment était venu de vaincre ma dépendance. En six mois, je suis passée de 200 mg de morphine par jour à zéro. Il a fallu un an pour que les symptômes de sevrage disparaissent complètement.

J’ai eu une révélation…

Quand la vie m’a accordé cette deuxième chance. Je me suis rendu compte que je vivais pour ma carrière, mes ambitions. Je ne voyais pas la vie passer. Mes priorités ont changé. Qui va te tenir la main à ta mort ? Ce ne sont pas tes collègues ni ton entreprise. Ce sont tes proches.

Les effets sur ma famille

Ça a été très difficile, pour mon couple surtout. La chimio perturbait mon sommeil, je n’étais pas capable de me lever le matin. Mon mari m’a toujours soutenue (psychologiquement et financièrement), mais je sentais qu’il me prenait en pitié. On a dû embaucher une nounou pour s’occuper des enfants. J’ai quand même toujours tenu à préparer leur souper, à être auprès d’eux pour les devoirs, en tentant le plus possible de faire en sorte qu’ils ne s’aperçoivent de rien. Mon mari a été mon roc, mon ange. Il a fait ce qu’il pouvait.

Photo: Virginie Gosselin

Ce que mon nouveau métier m’apporte

Pendant longtemps, je ne me suis pas sentie vivante. En accompagnant des aventuriers, comme Samuel Ostiguy, ou des fous de l’adrénaline, comme le parachutiste Bertrand Cloutier, je revis. Le cœur me pompe, je sens mon corps à 200 %, je suis vivante! Et comme je participe à leurs péripéties, il faut que je puisse les suivre. Alors je m’entraîne à fond! Ma musculature m’aide à faire tenir en place mes os fragilisés.

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Ce changement de vie était nécessaire…

Parce que j’évoluais dans un milieu où il y a une grande part de fake, de bullshit. C’est un monde qui se fait des accroires, où il y a de gros ego.

La maladie, un cadeau?

Oui, car je préfère la Janylène d’aujourd’hui à celle d’avant, même si la maladie n’a pas disparu. J’ai envie de semer le bonheur autour de moi, c’est devenu une mission. Par mes reportages, je veux inspirer les gens. Maintenant, je prends le temps de vivre, d’être heureuse, de ressentir les choses et d’écouter.

Ce qui me manque parfois

Les moments passés en studio. Voir mes poulains performer me manque. Mes artistes, c’étaient comme mes enfants. J’étais leur fan! Mais, en même temps, je sentais qu’il me manquait quelque chose. La vraie moi était cachée quelque part, et elle est maintenant révélée.

Le livre qui m’a inspirée

Libérez votre créativité, de Julia Cameron, m’a beaucoup aidée. Ce livre propose une série d’exercices, à effectuer chaque jour pendant 12 semaines, qui nous mène au bout de notre réflexion, et qui nous permet de réajuster notre réalité à notre imaginaire.

À celles qui seraient tentées de vous imiter, vous dites…

Connectez-vous à l’enfant qui rêve. Dites-vous : «Pourquoi pas!» Tu as toujours rêvé de faire quelque chose? Fais-le! Et tant qu’à le faire, fais-le bien.

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