Il ne le dit pas comme ça mais François Pesant est un peu fauché ces temps-ci. Probablement parce qu’il vient de passer la moitié des 24 derniers mois à travailler sans salaire.
Tout ce temps, il l’a consacré à documenter un de ces sales petits secrets qui tapissent le fond de l’existence humaine.
Il a par exemple passé quatre mois à dormir dans un vieux Dodge Caravan acheté pour l’occasion, à sillonner les États-Unis, de New York au Texas, de l’Ohio à l’Arkansas. Plus de 15 000 km en solitaire pour aller à la rencontre d’Américaines (et quelques Américains) d’une espèce rare. Ils ont tous trois points communs : vétérans d’Irak ou d’Afghanistan, ils ont tous été violés par un frère d’armes. Et ont été capables d’en parler ouvertement.
Tout ça, c’est un peu la faute de Châtelaine. Il y a deux ans, François nous avait proposé un reportage sur les soldates américaines qui rentraient d’Irak. C’est quand deux des femmes interviewées lui ont spontanément raconté leur agression qu’il a décidé de creuser le sujet. Il est tombé sur un chiffre affolant : 20 000 viols par an dans l’armée américaine.
Trouver les victimes a demandé des mois de recherches. Des mois à se faire claquer la porte au nez par le ministère américain des anciens combattants et par les ONG. À faire le pied de grue à la porte des refuges qui abritent les vétérans tombés dans l’itinérance.
Tout ce travail a connu son aboutissement dans L’ennemi intérieur, recueil de photos et de témoignages, qu’il a pondu en équipe avec Alexandra Geneste, une journaliste française basée à New York. L’ouvrage, publié par l’éditeur français Neus, est sorti en France à la fin août et arrive aujourd’hui dans les librairies québécoises.
François, lui, est à Mexico, sa nouvelle ville d’adoption, à essayer de monter un studio pour pouvoir gagner sa croûte.
Pour voir d’autres facettes du travail de François Pesant : francoispesant.com
Louise