Société

Les mères portent encore le fardeau de la conciliation travail-famille

«Les couples dépensent plus d’énergie à se dire égaux qu’à mettre cette égalité en pratique.» État des lieux.

Finie, l’époque où l’homme et sa fiancée convolaient avant d’endosser les rôles de pourvoyeur et de ménagère. «On est loin de ce modèle, affirme Hélène Belleau, chercheuse sur le couple et la famille à l’Institut national de la recherche scientifique (INRS). Mais on n’a pas atteint l’égalité non plus.»

Ghislain&Marie David De Lossy/Cultura/Corbis

Au boulot!

Aujourd’hui, trois mères de jeunes enfants sur quatre a un emploi. Autonomes sur le plan financier, souvent copropriétaires, elles peuvent se permettre de quitter un ménage qui bat de l’aile et de subvenir aux besoins de leur famille.

Moins de présence, plus de tâches

Les mères travaillent plus, mais elles continuent de porter le fardeau de la conciliation travail-famille, soutient Hélène Belleau. «Avant, Madame s’acquittait des tâches domestiques pendant les heures où Monsieur était au bureau ou à l’usine.» Aujourd’hui, avec 40 heures de présence en moins par semaine auprès des enfants (35 h pour l’emploi et 5 h dans les transports – trajets maison-garderie-boulot, emplettes…), elles se tapent 5 h de tâches domestiques de plus que leur conjoint. Pour y arriver, elles grugent sur leur temps personnel.

 De l’aide pour les parents

«Les couples dépensent plus d’énergie à se dire égaux qu’à mettre cette égalité en pratique», illustre Hélène Belleau. Une question de dynamique conjugale, mais il y a plus: dans les milieux de travail à prédominance masculine, il est encore mal vu qu’un père prenne un congé parental ou s’absente pour veiller sur un enfant grippé. «Le gouvernement doit imposer des mesures pour faciliter la vie des parents», avance la chercheuse. On pense horaire flexible, congés payés pour raisons familiales, gagne-pain à domicile, réaménagement ou réduction du temps de travail…

Écart de revenus

Certaines inégalités se reflètent aussi sur les finances. Certes, de plus en plus de mères gagnent autant sinon un peu plus que leur chéri (plus de 30 %, selon les données du recensement de 2011), mais cette situation est souvent temporaire. Et celles qui touchent un salaire vraiment supérieur représentent une minorité. En 2011, les mères de jeunes enfants gagnaient en moyenne 64 % du salaire des pères, contre 80 % chez les femmes en couple qui n’avaient pas d’enfants. C’est donc dire que l’écart se creuse avec la naissance des petits.

 Priorité aux enfants, mais…

Bon nombre de jeunes mamans refusent de jouer les superwomen. Épuisées par les exigences du travail qui pèsent sur leurs épaules, elles choisissent de ralentir afin de s’investir davantage auprès des enfants: congé de maternité prolongé, emploi à temps partiel, retrait du marché de l’emploi… À long terme, pourtant, elles en payent le prix. Pour pallier le manque à gagner, leurs conjoints mettent les bouchées doubles – ce qui leur vaut parfois promotion et augmentation de salaire. Ils en profitent souvent pour faire des placements personnels, alors qu’elles ne mettent pas un sou de côté. Lorsque le couple éclate, elles se retrouvent le bec à l’eau.

 De mères en filles

Comment allaiter bébé? Quoi mettre dans son assiette? À quelle heure doit-il dormir? Ce savoir qui, autrefois, se transmettait de mère en fille a été discrédité au profit de celui des experts, croit Hélène Belleau. «Aujourd’hui, on se fie davantage aux conseils des professionnels de l’éducation.» Mamie est encore sur le marché du travail, ou alors elle tient le rôle d’aidante naturelle auprès de sa propre mère. «Ça rebrasse les rapports entre les générations», conclut la chercheuse.

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