Famille tout compris

L’Hôpital de Montréal pour enfants vient-il de faire une campagne publicitaire sexiste?

Une fillette habillée en princesse et un garçon déguisé en astronaute. La dernière campagne de collecte de fonds de l’Hôpital de Montréal pour enfants est-elle sexiste sans le vouloir?

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Il y a quelques jours, la photo ci-dessous a beaucoup circulé dans mon réseau Facebook. On y voit deux affiches de la plus récente campagne de la Fondation de l’Hôpital de Montréal pour enfants. Les images d’un jeune astronaute et d’une petite princesse sont collées sur un panneau de bois. C’est de l’affichage sauvage, comme on en voit partout en ville. Quelle est votre première impression?

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Source: Christine Gosselin

La personne qui a partagé cette photo sur les réseaux sociaux l’a accompagnée de cette légende: «Au Nouveau Children’s, on devrait soigner la propension aux stéréotypes navrants.»

Avez-vous accroché sur cette représentation des rôles masculin et féminin? Le garçon est déguisé en explorateur de l’espace, un rôle plutôt actif qui combine science et sport, tandis que la fillette incarne une figure surtout célébrée pour ses qualités d’hôtesse, sa taille fine et le contenu de son walk-in royal. Pour ma part, les stéréotypes flagrants m’ont sauté aux yeux. J’ai écrit spontanément comme commentaire «Ch’tannée!» sous un des nombreux partages de la publication originale.

J’ouvre une parenthèse: (Si vous observez la façon dont on parle de Kate Middleton, une vraie de vraie princesse, vous constaterez qu’on évalue presque toujours ses tenues ou sa silhouette. Mais toute duchesse de Cambridge qu’elle soit, je doute qu’elle porte le collier de bonbons avec autant de grâce que la petite Lina.)

Maintenant que vous savez que ces photos ont été partagées sur Facebook pour dénoncer le sexisme des affiches et que je vous confirme que je suis fatiguée de voir de telles images stéréotypées, est-ce que votre perception d’elles a changé?

Continuons l’exercice. Une amie vous apprend que la campagne publicitaire ne compte pas que ces deux affiches. Il y a aussi un adolescent habillé en chevalier et… une petite fille en pirate. Ces deux affiches supplémentaires n’ont pas été collées sur le panneau de bois, auprès de l’astronaute et de la princesse. Le corpus est donc un peu plus diversifié, mais vous ne le saviez pas. Est-ce moins sexiste?

Finalement, en retournant lire les commentaires sur Facebook, vous tombez sur cette précision, communiquée par les instances officielles du Children’s: «Cette campagne met en vedette des patients de l’Hôpital qui incarnent leur propre rêve.» David, Lina, Zoe et Hubert sont donc des enfants malades qui ont passé beaucoup de temps entre les murs de l’établissement et ils ont choisi le personnage qui les inspirait le plus. Ça aussi, difficile de le savoir en regardant uniquement la photo ci-haut.

De quel œil voyez-vous ça, maintenant que vous connaissez tout le contexte? Belle étude de cas de communication, non?

Si j’ai eu envie de vous parler de cette photo, c’est que mon opinion a évolué au fil des informations qui me sont parvenues graduellement. Je suis passée de «tannée» à «touchée.» Pourquoi? Parce qu’on ne peut pas juger le rêve d’un enfant, malade ou pas, avec les mêmes critères d’analyse qu’une campagne de pub. Le fait que le choix du personnage revienne aux enfants apporte une nuance importante selon moi.

Un rêve, ça nous appartient, ça nous anime, ça nous soutient. Ça a un sens et une valeur pour nous et pour personne d’autre. C’est précieux et c’est personnel.

Alors si une fillette de 3 ans désire être une princesse, jamais je n’oserais lui dire : «Ton rêve de princesse, c’est un peu stéréotypé, hein? Peux-tu en choisir un autre, plus féministe, mettons?» Non, je vais dire: «Tu peux être ce que tu veux si ça te fait du bien.»

Toutefois, je vais aussi remarquer qu’elle désire être comme la plupart des petites filles de son âge. Trois ans, c’est le début de la période intense des princesses-roses-qui-brillent. C’est cette standardisation dans les aspirations et les inspirations des enfants qui doit être examinée de plus près. Les rêves ne sont pas déconnectés de la réalité. Et si cette réalité, modelée par les lois du marché, ne se décline qu’en rose ou bleu, il ne faut pas être surpris que les enfants rêvent en deux couleurs.

Bref, j’aime la campagne du Children’s dans son ensemble (la pub télé exprime encore mieux le slogan «Où les enfants restent des enfants»), et je trouve dommage qu’une question de contexte vienne nuire à la compréhension d’une si belle cause. Car lorsque je vois un garçon astronaute aux côté d’une fillette princesse, je continue de trouver ça stéréotypé.

Que pensez-vous de cette campagne publicitaire de l’Hôpital de Montréal pour enfants?

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Pour écrire à Marianne Prairie: chatelaine@marianneprairie.com

Pour réagir sur Twitter: @marianneprairie

Marianne Prarie est l’auteure de La première fois que… Conseils sages et moins sages pour nouveaux parents (Caractère)

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