Ce weekend, je suis allée dans un magasin à grande surface et je suis tombée sur ceci :
J’ai figé. J’ai pris l’exemplaire dans mes mains, incrédule et confuse. Je ne savais pas quoi faire entre hurler de rire, brûler ma brassière ou rouler des yeux jusqu’à me fouler le globe oculaire. C’était si absurde, si ridicule.
Coloriages.
Pour maman débordée.
Avec des sacoches sur la couverture.
J’ai redéposé le cahier et j’ai eu une réaction typique de blogueuse : j’ai pris une photo et je l’ai partagée sur les réseaux sociaux. J’ai ajouté une légende qui traduisait mon incompréhension : « Mais… POURQUOI? »
Un pourquoi en majuscules pour résumer toutes les autres interrogations qui surgissaient dans ma tête. Comment une femme dite débordée trouve-t-elle le temps de colorier? C’est quoi des dessins « pour maman »? Des sacoches, vraiment? Et est-ce que les papas ont leur équivalent? Des BBQ peut-être? Puis c’est quoi tout ce buzz avec le coloriage?
Pourquoi? Ça se résume en un mot : marketing. Une stratégie de mise en marché pour vendre davantage de copies.
C’est très habile. D’abord, on identifie de façon précise à qui s’adresse le cahier de coloriage (la mère), question de personnaliser le produit et de faire croire qu’il est tout spécialement conçu pour elle. Puis, on la prend par les émotions en l’interpelant avec un qualificatif puissant et rassembleur (débordée). Finalement, on utilise un symbole très stéréotypé (la sacoche) pour titiller l’inconscient et ne laisser aucune place à l’interprétation.
Parenthèse : vous remarquerez que la même stratégie est appliquée aux livres pour enfants qui sont de plus en plus nombreux à arborer des couvertures bleues ou roses et des titres agrémentés des mentions sans équivoque « pour garçons » ou « pour filles ». Les jouets subissent aussi le même sort. Et les vêtements. Et les fournitures scolaires. Bref, si tout le monde s’y met, c’est parce que c’est une tendance lourde du marché… mais une tendance qui marche à fond.
Justement, ce qu’on a devant les yeux, c’est l’union de deux grosses tendances : le coloriage comme méthode de détente et les mères débordées comme public cible. On comprend pourquoi. Les mères effectuent 85% des courses pour leur famille et ont un pouvoir d’achat de quelques milliards de dollars par année, en Amérique du Nord seulement.
La chaîne de magasins Michaels (où j’ai pris la photo) a vu ses ventes de livres à colorier pour adultes bondir du tiers depuis l’année dernière. (URL)
Sur papier, le concept se défend : la mère débordée a besoin de se relaxer. Mais quand je regarde un livre comme Coloriages pour maman débordée, je trouve que les « marketeux » nous prennent VRAIMENT pour des sacoches.
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