Société

On s’aime, le handicap n’y change rien

David et Lise s’aiment fort depuis 20 ans, même s’il y a un fauteuil roulant entre eux.

«Ça prend du courage!» Cette phrase, Lise Poulin et David Noël, un couple de Lachine, l’ont entendue souvent. Bien sûr, vivre avec l’amyotrophie spinale présente de nombreux défis, tout comme être en couple avec une personne qui en souffre. Mais Lise et David ne considèrent pas leur vie comme un fardeau. Et ceux qui les connaissent voient leur amour comme un exemple à suivre.

«Oui, ma blonde est handicapée et ça implique que je l’aide dans tout plein de petites actions du quotidien. Mais elle aurait aussi pu avoir une voix fatigante. Quand on aime, ces choses-là ne comptent pas», soutient David.

Il a rencontré Lise il y a plus de 20 ans, sur l’un des premiers sites de clavardage.

«On discutait ensemble, mais je n’avais jamais mentionné que j’étais en fauteuil roulant. Pour moi, ça ne me définit pas. C’est comme dire que je porte des lunettes, c’est inutile», raconte Lise.

C’est quand il a vu une photo d’elle que David est tombé amoureux. Il a d’abord remarqué le sourire de la jeune femme de 18 ans, avant de voir le fauteuil. Puis, il a voulu la rencontrer. Pendant des mois, il a fait l’aller-retour entre Victoriaville, où il habitait, et Montréal pour être auprès de sa douce. Il a finalement déménagé afin de se rapprocher d’elle.

«Quand on a décidé d’emménager ensemble après quatre ans à se fréquenter, ça a un peu inquiété mes parents, se souvient Lise. Jusque-là, David ne voyait que le plus beau. Quand il passait me prendre, j’étais déjà lavée, habillée. Eux connaissaient l’ampleur de la tâche et ils étaient deux pour l’accomplir. Ils voulaient être certains qu’on savait dans quoi on s’embarquait.» Mais rien n’aurait pu décourager David.

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Quotidien partagé

David doit aider Lise à boire, à se laver, à s’habiller, mais cette dépendance ne rend pas leur relation inégalitaire. Lise s’occupe de bien d’autres choses: prise de rendez-vous, tenue des comptes… «David, c’est les bras. Moi, je me charge du reste», lance-t-elle à la blague.

Aux yeux de David non plus, la relation n’a rien d’inégal. «On s’est engagés tous les deux là-dedans. Et je dirais même que le plus gros effort, c’est elle qui l’a fait en premier. Elle m’a accordé sa confiance.»

Entre eux, plus de jardin secret. Seulement un grand jardin communautaire. Cet «engagement ultime», comme ils le décrivent, les a menés à développer une complicité bien au-delà de ce que les autres couples vivent. «On ne peut jamais rester fâchés bien longtemps, puisque, chaque soir, il doit me porter jusqu’à notre lit», souligne Lise.

Ils font tout ensemble. Ils travaillent tous les deux pour Vidéotron, elle au service à la clientèle, et lui au soutien technique. Et leurs temps libres se passent entre les Chevaliers de Colomb, les collectes de fonds pour Dystrophie musculaire Canada et le Club des personnes handicapées du Lac-Saint-Louis, que Lise préside. «On prend ça comme une façon de se rapprocher. Il y a toujours moyen de voir les choses d’une manière positive», indique-t-elle.

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Vivre sans obstacle

«C’est grâce à Lise si rien ne nous arrête. C’est dans son tempérament. Elle a déjà accompli tellement de choses que tout le monde croyait impossibles pour elle. Elle a fini son baccalauréat alors que tout le monde disait qu’elle n’y arriverait pas. Elle s’est mariée. Elle est même devenue la première élue québécoise avec un handicap quand elle a remporté le siège de conseillère municipale à Lachine en 2009», énumère David.

Lise a son point de vue là-dessus. «Je crois que c’est une question d’attitude. Je ne m’apitoie pas sur mon sort. C’est sûr que ça paraît dans notre façon de vivre», fait-elle valoir.

Quand ils veulent oublier le fauteuil et ses inconvénients pendant un temps, ils font un voyage dans un des parcs d’attractions de Disney. «C’est notre dada. On y est allés 10 fois déjà. Je crois qu’on aime ça parce qu’on a gardé nos cœurs d’enfants, mais aussi parce que tout y est accessible. Pour nous, ce sont de vraies vacances», dit David.

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Pour la vie

L’église de Lachine était bondée le 23 septembre 2006, quand Lise et David se sont dit «oui» pour la vie. Plus de 500 personnes (invitées ou non) étaient venues voir les promis pour leur grand jour.

Quand les portes se sont ouvertes sur Lise dans sa robe blanche et qu’elle s’est avancée dans l’allée en fauteuil, ils ont tous été éblouis. La magie a opéré plus que jamais.

La maladie modifie le chemin que le couple emprunte, les étapes de la vie y sont peut-être un peu différentes. Ils n’auront pas d’enfants – ils ont un rôle privilégié auprès de leurs neveux et nièces avec qui ils passent beaucoup de temps. La retraite arrivera plus tôt, puisque Lise ne pourra sans doute pas travailler jusqu’à 65 ans, l’amyotrophie spinale étant dégénérative et lui enlevant toujours un peu plus d’autonomie.

Mais cette route, ils la feront ensemble, côte à côte, comme ils ont traversé les 20 dernières années.

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