Société

Philippe-Audrey Larrue St-Jacques: les hommes Québécois s’habillent-ils mal?

L’humoriste rêve du jour où les Québécois auront du style comme les Européens. Ils seront tellement plus beaux!

Photo: Jean-François Leblanc

À Paris, deux choses me frappent. D’abord, l’odeur du métro qui n’a rien à envier à celle d’une toilette chimique un midi caniculaire de juillet. Puis, le style des Parisiens. C’est comme s’ils étaient toujours bien habillés. Jamais, à Paris, ne me suis-je posé la question: « Se rend-il au travail ou au Super Motocross? » Alors qu’au Québec, j’ai demandé ça à un homme qui me faisait passer une entrevue d’embauche (je n’ai pas obtenu le poste…).

Est-ce que les hommes d’ici ont du style? En m’offrant cet « Espace libre », Châtelaine – en passant, salutations à vous qui me lisez en attendant votre nettoyage dentaire! – m’a permis de mener enquête auprès d’expertes de la mode (qui ont préféré garder l’anonymat) afin de savoir si les hommes québécois s’habillent mal.

« Ce n’est pas qu’ils s’habillent mal! [Rires] C’est qu’ils choisissent mal », m’a répondu une styliste d’ici ayant travaillé à l’international. Si sa réponse me rassure, elle ne m’éclaire pas tellement. Qu’est-ce qu’on ne sait pas choisir au juste?

« Déjà, beaucoup de gars achètent la mauvaise taille. C’est souvent trop grand. Je comprends que c’est plus confortable, mais ça ne met rien en valeur. » Décontracté dans mes pantalons 36 et ma chemise XL (alors que je porte du 33 et du L), je lui réponds que je ne vois pas pourquoi elle dit ça.

« En plus, ils ne choisissent pas le bon agencement de motifs ou la bonne coupe. Dans un look, il y a toujours une pièce dominante. Ça peut être une chemise, un veston, des chaussures, peu importe… Une fois cet élément central déterminé, les autres vêtements doivent l’accompagner. S’il y a une surabondance d’imprimés similaires, la dominance sera noyée. Si la coupe n’épouse pas bien le corps, elle aura l’air mal faite. Tu comprends? »

Je comprends surtout que si je ne veux plus commettre de fautes de style (non, je ne porte pas toujours un complet), je dois refaire ma garde-robe ou devenir nudiste… Je saisis nos faux pas, mais avons-nous réellement du choix? À ma dernière visite dans un grand magasin, le règne du t-shirt sans personnalité et des pantalons trois quarts beiges n’était pas à la veille de s’achever. En fait, j’ai l’impression que la section mode masculine est l’incarnation vestimentaire d’une salle d’attente de la SAAQ, féerie en moins.

« C’est sûr que le choix est plus limité quand il s’agit de mode destinée à des marchés de masse, poursuit ma styliste. Même pour moi qui connais tous les acheteurs des grands magasins, ce n’est pas évident de trouver les dernières collections des grands couturiers au Québec. Donc, j’imagine pour le grand public… »

Qu’est-ce que je peux faire alors? C’est à ce moment qu’intervient une acheteuse québécoise habituée de faire affaire avec des marques internationales : « Il y a 20 ans, c’était très compliqué. Mais aujourd’hui, on a la chance d’avoir Internet et Fedex! Faut juste être prêt à y mettre le prix. »

Cette dernière phrase m’intrigue. Est-ce une façon polie de dire que le Québécois moyen est cheap?

« Non. C’est seulement que le rapport à la qualité et au prix est différent ici. Au Québec, on préférera acheter trois paires de souliers à 100$ plutôt qu’une seule à 300$. Sauf que des chaussures à 100$ ne sont, en général, pas conçues pour durer. Ailleurs dans le monde, les hommes vont privilégier la qualité. »

Je veux bien payer pour la qualité. Mais, aux yeux de plusieurs, dont les miens, il semble qu’il y a une démesure dans le prix des vêtements. À Dubaï, une paire d’escarpins a été mise en vente à 17 millions de dollars récemment. À ce prix-là, mes souliers sont mieux de résister aux sept cavaliers de l’Apocalypse et de me cuisiner des œufs bénédictine tous les matins.

« C’est sûr qu’en mode les prix ne sont pas toujours raisonnables, poursuit mon amie acheteuse. Il faut s’assurer qu’on n’achète pas un vêtement uniquement parce qu’il est à la mode, mais bien parce qu’il a du style. » Et pour savoir si un vêtement a du style? « S’il aurait été beau il y a 20 ans, il le sera encore dans 20 ans », résume pour sa part la styliste.

Je serai honnête avec vous. Je ne sais toujours pas si les Québécois s’habillent mal. Par contre, je sais maintenant comment faire pour mieux m’habiller: privilégier la qualité, mais surtout le style. Ce qui me rappelle cette célèbre citation d’Yves Saint Laurent: « Les modes passent, le style est éternel. »

Alors, chers amis, n’ayons plus peur de choisir l’éternité!

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Philippe-Audrey Larrue St-Jacques poursuit en 2019 la tournée de son spectacle Hélas, ce n’est qu’un spectacle d’humour. On le verra aussi dans la nouvelle saison de Like-moi ! (Télé-Québec) et on continuera de l’entendre chaque semaine sur les ondes de CKOI.

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