Une tradition virtuelle s’enracine tranquillement chez nos voisins du sud (pas l’Ontario, l’autre), celle de publier des guides de survie préparatoires au souper de la Thanksgiving et à l’historique rivalité entre Democrats et Republicans. Ici, c’est plutôt à Noël qu’on se réunit pour vivre un malaise en gang autour d’un gros oiseau mort.
N’étant pas de culture catholique, je fête Noël avec plaisir mais sans grande conviction, et comme ma famille élargie est dispersée, je suis dispensée des malaises qui accompagnent souvent les grandes réunions avec de la parenté qu’on voit rarement. J’ai cependant été invitée à suffisamment de partys de famille de belle-famille, proches et amis pendant les Fêtes pour être fascinée – disons-le, séduite – par la chose.
Tout le monde connaît la règle: éviter de parler d’argent, de religion et de politique, surtout après quelques verres, et double-surtout en ces temps de désordre politique et social. Mais dans toute famille, on peut toujours compter sur quelqu’un pour enfreindre la règle non écrite et y aller tout bonnement de son commentaire incendiaire formulé avec la finesse d’un bulldozer.
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On échange tout bonnement sur le prix faramineux des oeufs bio, et BAM!, Chantal annonce que la viande halal va bientôt être imposée à nos enfants. Et comme du dentifrice qui quitte son tube, il n’y a pas de retour en arrière possible. Un mot suffit pour anéantir le consensus festif et diviser le party comme Moïse a divisé, jadis, la mer Rouge.
Cette année, le terrain est plus miné que jamais. La CAQ, Québec solidaire, les signes religieux, l’immigration, le troisième lien, les francophones en Ontario, les anglophones au Québec, les subventions aux médias, Justin Trudeau, les élections fédérales, le pacte pour l’environnement, le pacte de l’ONU à Marrakech, le réchauffement climatique, l’appropriation culturelle, les musulmans, les gilets jaunes…
La solution simple: éviter les soupers à risque. Briller par son absence. Se réfugier au soleil. Anyway, avec les réseaux sociaux, manque-t-on vraiment un party!
Mais pour de multiples raisons, par exemple la naïveté, l’amour de sa parenté ou encore le masochisme pur, on peut choisir d’y aller. Et alors, il existe moult guides de survie pour vous assister.
J’ai lancé la question sur les réseaux sociaux, et la technique la plus populaire semble être la même que pendant une arrestation: coopérer et garder le silence parce que tout ce que vous direz sera retenu contre vous.
Pour survivre aux soupers qui tournent mal, il existe quelques solutions: passer la soirée avec les enfants, s’enfermer à la salle de bain avec son cell, sortir son artillerie lourde de sarcasme, détourner le sujet en lançant le membre radoteur de la famille sur une histoire mille fois racontée, se noyer dans le bar envers et contre les recommandations d’Éduc’Alcool, et ma préférée, y aller avec quelqu’un qui va au front à notre place et s’installer dans les gradins pour apprécier le spectacle.
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Personnellement, j’ai un faible pour cette dernière technique. Et n’ayant pas de grand party de Noël à l’agenda cette année, je devrai me contenter de vivre ce temps magique de la discorde festive à travers les récits des courageux qui braveront routes et tempêtes pour honorer les liens de sang et d’alliances.
N’ayant pas de contribution utile à faire pour votre survie, je peux à tout le moins m’investir dans votre divertissement. Avec l’aide précieuse de mon collègue Mathieu Charlebois (qu’est-ce qu’une idée sans l’apport d’un homme blanc), je vous offre dans un emballage virtuel zéro déchet Le BINGO des Fêtes 2018 pour vous tenir compagnie dans les estrades!
Manal Drissi, en collaboration avec Mathieu Charlebois, pour Châtelaine.Les règles sont celles d’un bingo classique : Chaque fois qu’une personne prononce une des phrases, on la coche. La première à cocher 5 cases en ligne l’emporte!
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Manal est chroniqueuse, conférencière, procrastinatrice et aime se dire «ironiste» de profession. Elle nous livre chaque mois des réflexions tout en humour et en humeurs sur les aléas de la vie d’une femme moderne.
Les opinions émises dans cet article n’engagent que l’auteure et ne reflètent pas nécessairement celles de Châtelaine.
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