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Imaginez-vous retirer vos vêtements et vous glisser entre les draps avec l’être aimé sans avoir pris une goutte de vin. Vous ressentirez chaque caresse et entendrez chaque soupir, mais le petit hamster qui fait tourner sa roue dans votre tête aura le champ libre. Or, la charge mentale, l'image corporelle ou le stress de ne pas atteindre l'orgasme assez rapidement sont autant d'obstacles au laisser-aller nécessaire pour atteindre le nirvana.
Ainsi, prendre quelques verres de vin avant de sauter au lit est une pratique courante. Une pratique qui a toutefois ses désavantages puisque l’alcool, un dépresseur du système nerveux central, embrume le cerveau et ralentit le fonctionnement du corps. En consommer avant une relation sexuelle a donc un effet très concret sur les capacités physiques.
D’où l’émergence du concept de sobergasm, un mot-valise réunissant les idées de sobriété et d’orgasme. Inventé en 2024 par les sex-shops Lovehoney et le fabricant de boissons sans alcool Clean Co, ce néologisme devait inciter les Britanniques à essayer autre chose que l’alcool pour stimuler leur libido. Et ce n’est peut-être pas une mauvaise idée, jugent les sexologues Laurence Desjardins et Myriam Daguzan-Bernier.
L'alcool provoque un certain laisser-aller et peut inciter à prendre des décisions impulsives qui donnent l'impression que la relation sexuelle a été satisfaisante, dit la sexologue Laurence Desjardins. « C'est l'excitation de se permettre des interdits, comme de faire l'amour dans un lieu public. »
Les effets physiologiques de l’alcool risquent toutefois de rendre l’expérience moins agréable que prévu. « L'alcool modifie la réponse sexuelle, explique Laurence Desjardins. Chez l’homme, l’érection, la lubrification et l’éjaculation peuvent devenir plus difficiles. Chez la femme, la lubrification diminue et l’orgasme est plus difficile à atteindre. »
Sans compter que les gestes impulsifs posés sous l’effet de l’alcool peuvent avoir des conséquences. « Ceux qui consomment de l'alcool avant une relation sexuelle peuvent se poser plus de questions le lendemain, rappelle la sexologue Myriam Daguzan Bernier. Est-ce que c'est vraiment ça que je voulais ? Ça peut nous faire prendre des mauvaises décisions. »
Laurence Desjardins donne quelques exemples : « Lorsque l’on consomme, on fait moins attention à l'autre, à soi et au contexte. Ça influence le consentement, qui n'a pas de valeur quand l’autre personne est intoxiquée. L'alcool augmente aussi le risque de relations non protégées, donc d'ITSS ou de grossesse non désirée. »
Garder la tête froide
Vivre sa sexualité sans s’engourdir avec de l’alcool n’est pas forcément chose facile. « Il faut affronter nos malaises et réussir à passer par-dessus, estime Laurence Desjardins. On est alors conscient de ce qui se passe et on reste dans le moment présent. »
Être capable d'abandon, ça s’apprend. Première mission : établir si l'alcool vous cause vraiment des problèmes dans votre vie sexuelle. « Si une femme a une sexualité épanouie et que sa consommation d’alcool ne lui cause pas de souffrance, il n'y a pas nécessairement de raisons pour changer ça », nuance Myriam Daguzan Bernier.
Si malaise il y a, toutefois, une réflexion s’impose. Par exemple, si vous avez besoin d'un verre avant de vous déshabiller parce que vous avez une image négative de votre corps, il faudra travailler sur votre confiance en vous. C'est plutôt une question d’anxiété ? Il faut alors apprendre à vous détendre. Au besoin, une sexologue pourra vous aider dans ce cheminement.
Pour lancer votre réflexion, les expertes consultées proposent de vous poser ces questions, qu’elles abordent avec leur clientèle en clinique :
Si vous réalisez que vous avez un problème avec la sexualité – et non avec l’alcool, ce qui demande un autre type d’intervention – et que vous cherchez à être accompagné dans votre démarche pour le régler, les sexologues sont formées pour vous épauler. Lorsque la consommation dans un contexte sexuel engendre des conséquences négatives (vous absenter du travail, par exemple) ou de la culpabilité, c’est signe qu’il est préférable de consulter.
Il faut surtout vous rappeler qu’arrêter de consommer va changer votre sexualité. « C'est normal que les choses ne se vivent pas de la même façon, rassure Myriam Daguzan Bernier. En consultation, on va travailler pour trouver comment se procurer du plaisir. L'idée est souvent de revenir à son corps, à ses sensations. »
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Constance Cazzaniga collabore au magazine Châtelaine depuis l'été 2024. Comme journaliste pigiste, vous pouvez la lire dans différents magazines québécois et dans les cahiers spéciaux du Devoir, notamment. Anciennement cheffe de la section culturelle au journal Métro, elle se spécialise en culture, société et art de vivre, avec un intérêt marqué pour la mode, la beauté et la gastronomie. Vous la croiserez peut-être dans une salle de spectacle, en train de lire un essai féministe avant la levée du rideau.
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