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Société

Julie Perreault: la peur du mirage

Pour faire le portrait d’une vedette, mieux vaut sortir des sentiers battus. Un café? Trop fréquenté. Le musée Grévin? «Très bien!» a acquiescé Julie Perreault, amusée. Un lieu propice aux confidences: les oreilles y sont de cire…
Par Jean-Yves Girard
Julie Perreault: la peur du mirage Photo: Louise Savoie

Si elle n’y avait jamais mis les pieds, ses enfants lui en avaient beaucoup parlé. Et là, par un après-midi du début de décembre, elle y était enfin, mais sans Thomas et Élisabeth, 14 et 7 ans. Et sans leur père, Sébastien Delorme, qu’un article récent décrit ainsi : un gars au « corps musclé et sexy », un acteur qui « nous donne chaud ». Hum. Est-ce un hasard ? Julie a gardé son manteau tout le long de la visite.

Visiblement, elle savourait ce moment volé à un agenda rempli qui s’apprêtait à être encore plus noirci. Le tournage de la 10e – et dernière – saison de 30 vies commençait quelques jours plus tard et, à titre d’interprète de l’enseignante au cœur du tourbillon, la comédienne était effrayée presque autant qu’excitée par le marathon qui s’annonçait. Une promenade de deux heures sans se presser dans un musée quasi désert habité par des statues muettes n’était donc pas pour lui déplaire.

Moi, une vedette ?

Le Grévin ratisse large : de Marie-Antoinette à Marie-Mai à Marilyn Monroe à Marie de l’Incarnation. Il abrite déjà quelques Julie : Snyder, Payette... À quand Perreault ? « Ce ne serait pas très pertinent », juge-t-elle.

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Elle n’a pas oublié quand et où la célébrité lui est tombée dessus. « En janvier 2006, à Tout le monde en parle. J’étais invitée à cause de Minuit, le soir. Il s’est alors passé quelque chose, pas juste avec le public, avec les médias aussi. Le lendemain, le téléphone n’arrêtait pas de sonner, et je pleurais tellement... »

De bonheur ? « Non ! J’ai été confrontée dans mon intimité. Je n’ai pas pris cette soudaine reconnaissance en me disant : “Yes ! je suis rendue hot !”, mais plutôt en pensant : “Oh mon Dieu ! est-ce que je vais être capable de rester qui je suis, est-ce que les gens, les journalistes, vont respecter ma pudeur ?” Tout cela me rendait très vulnérable. Je me souviens d’avoir parlé ce matin‑là à Louis [Morissette], un de mes super bons amis. » Ils le sont depuis 3 x rien, télésérie diffusée à TQS de 2003 à 2006 et qui les a tous deux lancés. « Je lui ai demandé, en larmes : “Qu’est-ce que je vais devenir ?” Et Louis de me répondre : “Julie, mets tes bottes, va prendre une marche, et le pire qui peut t’arriver, c’est que le monde te félicite pour ton travail.” »

Dix ans et maints succès plus tard (à la télé : Les sœurs Elliot, 19-2, Les jeunes loups et, au cinéma, Horloge biologique, Les 3 p’tits cochons, Le mirage), Julie ne s’est toujours pas acclimatée à la notoriété qui vient avec son métier. « Encore aujourd’hui, quand des inconnus me regardent, je me demande : “Qu’est-ce que j’ai ?” En venant ici, j’étais à un feu rouge et, dans la voiture d’à côté, les gens me faisaient des tatas et je ne comprenais pas. Ce qui m’intéresse n’est pas d’être reconnue dans la rue – à la limite, ça peut m’intimider –, mais de faire mon travail et de m’améliorer. Et je sais que la notoriété, qui n’est pas un gage de talent, est un avantage dans ma quête de travail. Avec le succès qu’a eu Le mirage, mon agent m’a dit : “Julie, tu pourras maintenant être considérée pour des premiers rôles.” » On les lui souhaite.

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Vie privée, vie publique

Ce qu’on connaît de sa vie ? Peu de choses. Julie Perreault préfère se garder une petite gêne. Enfin, elle essaie. « C’est rare que je parle de ma vie, même avec des collègues de travail. » Elle le fera ce jour-là par bribes, vite coupées pour ne pas en dire trop.

« Mes parents se sont connus très jeunes ; mon père donnait des cours de physique dans une école secondaire et ma mère était élève. Ils ont eu trois filles, et je suis la seule dans le milieu artistique. » Elle est née en banlieue de Montréal, à Le Gardeur. « C’est à côté de Repentigny et de Charlemagne », ville natale de Céline, la reine du Grévin, juchée sur une scène. Nous étions en fin de parcours et Julie laissait tomber la barrière, riait de bon cœur en prenant la même pose « célinesque » que la mère de René-Charles, Nelson et Eddy. « Je n’écoute pas beaucoup sa musique, je ne l’ai jamais vue en spectacle, mais le personnage m’intéresse. Partir de Charlemagne et se retrouver au top... »

Et toi, tu as déjà pensé faire carrière à l’étranger, comme ton amie Karine Vanasse (elles ont joué ensemble dans la pièce Extrémités, au Rideau Vert) ?

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« Non, jamais. Karine, qui est plus une connaissance qu’une amie, a 32 ans et pas d’enfant ; à cet âge, j’en avais deux. Mes objectifs changent en fonction de ma famille. Je ne veux pas briser son équilibre au profit d’un travail qui ne durera pas, d’une émotion passagère... Tout ça n’est rien à côté du fait que mes enfants ont besoin de moi. C’est sûr que j’aimerais accompagner un film à Cannes, mais pour l’instant je vais au Festival d’Abitibi-Témiscamingue et c’est ben correct aussi. »

Elle philosophe : « J’arrive à un moment de ma vie où des choses que je croyais très importantes le sont moins. »

Par exemple ? « Avant, c’était primordial pour moi de sentir que les projets dans lesquels je m’engageais étaient déterminants, pour que les gens aient une bonne impression de l’actrice que je voulais devenir. Je souhaitais m’imposer comme comédienne qui ne fait pas toujours la même chose, qui choisit ses personnages... »

Et aujourd’hui ? « C’est d’aller travailler et d’avoir du plaisir avec mes collègues. Apprendre à être satisfaite. Il est là, mon idéal. »

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Podz et Louis

À la naissance d’Élisabeth, en 2009, Julie s’est éclipsée des plateaux de tournage pendant deux ans. « Oui, ça m’a donné le vertige, mais je suis contente de l’avoir fait. On est quatre à table : j’ai la famille que je voulais. Prendre du recul, même si au début ça semble périlleux, c’est toujours positif quand tu te remets sur les rails. » En effet, car son retour a fait du bruit : Podz lui a offert un rôle important dans 19-2, l’une des télé­séries marquantes des dernières années.

Podz (Daniel Grou sur son passeport) a une feuille de route impressionnante. Sa rencontre avec Julie, lors de la première saison de 3 x rien, a été cruciale pour tous les deux. « J’ai appris mon métier avec lui. Quand on me demande quel a été mon plus beau projet, c’est encore 3 x rien qui me vient en tête. Ç’a été révélateur, déterminant quant à la façon dont j’avais envie de pratiquer ce métier et avec qui j’avais envie de le faire. Oui, Podz est un excellent directeur d’acteurs, mais il est surtout devenu mon meilleur ami. Il a ma confiance absolue, ce que j’accorde à très peu de monde. » Parce que c’était lui, elle a accepté de tourner nue pour une scène torride (dans Minuit, le soir). Elle rougit juste à l’évoquer. « Mais je ne le referai plus. »

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Avec Louis Morissette aussi, le lien d’amitié est solide, construit sur plusieurs années. « C’était important dans Le mirage, parce que lui et moi avions des zones difficiles à explorer et à interpréter. Et si on a été capables d’aller aussi loin, c’est que, quand je le regardais dans les yeux, je savais qu’il était disponible. » Avec Claude Legault, a-t-elle ajouté, son partenaire dans Minuit, le soir et 19-2, « c’est pareil ».

Dans Le mirage, film écrit et réalisé par son ami, Isabelle (Julie) se remet d’un burnout. Le couple qu’elle forme avec Patrick (Louis) a deux jeunes enfants, une grosse maison en banlieue avec piscine et tout le kit, dont des dettes, mais presque plus de rapports sexuels. Alors, monsieur va voir ailleurs... « La scène finale – où Isabelle confronte Patrick –, je l’ai souvent entendue, mais jamais regardée. On a présenté le film partout au Québec et, chaque fois, rendue à cette séquence-là, je fixais le plancher. »

Pourquoi ? « Je me suis beaucoup dévoilée dans ce rôle. Le jouer, c’est une chose. La regarder, elle, voir la souffrance de mon personnage, c’en est une autre. »

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C’est bien Julie Perreault...

Un moment cocasse est survenu dans la grande salle de bal du musée Grévin. Parmi le gratin international qui squatte le parterre à l’ombre de chandeliers kitsch (le couple Jolie-Pitt, Scarlett Johansson, Meryl Streep, Lady Gaga…) se glissent une poignée de personnalités locales. Dont Guylaine Tremblay tenant un trophée Artis. J’ai dit à Julie, huit fois finaliste pour divers prix mais jamais récompensée, qu’elle tenait là sa chance d’en voler un. Elle s’est alors collée tout près de la fausse Guylaine, immobile, une main sur l’Artis, pendant que je la prenais en photo. Une visiteuse, témoin de la scène, a sursauté quand Julie s’est remise à bouger. « Non, elle n’était pas en cire », l’ai-je rassurée. « Je vous ai reconnue, vous êtes Julie Perreault ! » La comédienne a esquissé un sourire gêné et baissé les yeux.

Julie Perreault: la croqueuse d'images

Julie Perreault: la peur du miragePhoto: Jean-Yves Girard

Julie Perreault: la croqueuse d'images

Pendant qu’elle examinait les mannequins de cire au musée Grévin, Julie évaluait aussi la ressemblance avec leur modèle ou la texture de leur peau. Elle voyait tout. « La statue de Jean-Pierre Ferland est hallucinante. Le travail dans le maquillage, la lumière, c’est très réussi. » En fait, quand elle parlait de la lumière sublimant ceci, dramatisant cela, l’actrice cédait la place à la photographe.








Sur la photo: Julie Perreault et la statue de la comédienne Guylaine Tremblay.

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Julie Perreault: la peur du miragePhoto: Jean-Yves Girard

Julie Perreault: la croqueuse d'images

D’un passe-temps au début, la photographie est devenue une passion, une carrière parallèle. « C’est parti du besoin que j’avais de me rassurer, de me prouver que j’étais capable de faire autre chose dans la vie. J’étais bien ancrée dans mon métier de comédienne et je voulais simplement aller voir ailleurs. Et je suis allée loin. J’ai ouvert un studio, boulevard Saint-Laurent, que j’ai gardé deux ans. Je viens de finir mon cours à l’INIS [Institut national de l’image et du son] en direction photo. Je me perfectionne tout le temps. »






Sur la photo: Julie Perreault et la statue de cire de l'actrice américaine Meryl Streep.

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Julie Perreault: la peur du miragePhoto: Jean-Yves Girard

Julie Perreault: la croqueuse d'images

Comment es-tu perçue par le milieu, par les autres photographes ? Comme une dilettante, une vedette qui prend des photos pour le fun ?




« C’est possible, mais les gens qui m’engagent apprécient mon travail. On m’appelle beaucoup pour de la pub, pour des magazines. Pour Châtelaine, j’ai déjà signé un reportage sur des familles. Et Jean‑Philippe Wauthier en couverture du cahier XY de La Presse, c’était moi. »



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Sur la photo: Julie Perreault posant aux côtés de la statue de Céline Dion.


Julie Perreault: la peur du miragePhoto: Jean-Yves Girard

Julie Perreault: la croqueuse d'images

Qu’apportes-tu de différent ?



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« Une proposition d’actrice. J’y vais avec l’émotion, avec ma façon de diriger les gens, avec le cadrage. Annie Leibovitz, de Vanity Fair, est une inspiration. J’ai une approche cinématographique. Dans une série pour le magazine Clin d’œil, je fais jouer à des comédiennes une scène dans un contexte particulier. J’essaie de leur rendre hommage. Je leur raconte une histoire, je leur fais écouter de la musique. À Magalie Lépine-Blondeau, croquée à la terrasse d’un café, j’avais dit : “Tu viens de passer la nuit avec un homme, peut-être ne le reverras-tu jamais...” Je suis fière de ce que je fais. »






Sur la photo: Julie Perreault et la statue de l'iconique Marilyn Monroe.

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