Culture

«L’amour de la vie et des gens allonge la vie, j’en suis certaine»

À quelques mois de son 100e anniversaire de naissance, la grande Janette Bertrand publie Cent ans d’amour – Réflexions sur la vieillesse. En voici l’introduction, qu’elle a choisi de dévoiler aux lectrices de Châtelaine.

J’ai quatre-vingt-dix-neuf ans et j’écris mon dernier livre… peut-être ! Au moment où vous me lirez, je voguerai vers mes cent ans. Je suis contente de moi, même si je dois ma longévité à ma génétique, je me fais encore croire que j’y suis pour quelque chose : l’amour de la vie et des gens allonge la vie, j’en suis certaine. Je suis triste aussi parce qu’il ne me reste pas beaucoup de temps pour profiter de la vie. Je ne m’accroche pas à elle, mais j’aimerais qu’elle s’accroche à moi, encore un petit peu, pas trop, juste assez. 

La vie, je l’ai aimée, je ne l’ai jamais tenue pour acquise, et ça depuis que j’ai failli la perdre à vingt ans de la tuberculose. La même année, après le décès de ma mère de cette maladie, je me suis emparée de ma vie, je l’ai façonnée à mon goût. Je sais qu’elle peut me quitter d’une minute à l’autre, alors je la dorlote, je la chouchoute. J’essaie de savourer chaque instant. 

J’essaie d’être une bonne blonde, une bonne mère, une bonne grand-mère et arrière-grand-mère. Je ne réussis pas toujours. Si je fais un gros effort physique, je dois me reposer le lendemain. Je fais un excès : trop manger, trop boire, me coucher trop tard ? J’assume et, après, je suis sage. 


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C’est parce que je crois à la passation du savoir que je suis triste ; c’est peut-être ma dernière rencontre avec vous, lectrices. Avec mes idées sur l’égalité entre les femmes et les hommes, je ne crois pas avoir tant de lecteurs masculins, alors un bravo spécial aux hommes ouverts qui me suivent, me lisent et m’apprécient. Je les accueille à bras ouverts. 

Je ne vous donnerai pas de recette miracle pour rester jeune et en santé, je veux tout simplement partager avec vous ce que ma longue vie m’a appris. Vieillir, ça s’apprend, et plus on commence jeune, mieux c’est. Je ne crois pas ceux qui disent : « Moi, j’ai plus rien à apprendre » ou « Moi, je suis trop vieux pour changer. » Ou encore : « À quoi ça sert d’apprendre ? Je vais mourir bientôt. » On peut apprendre et s’améliorer à tout âge. Et c’est parce qu’on apprend qu’on change. Je ne suis pas la même Janette qu’il y a vingt ans. J’espère m’être améliorée chaque jour de mon existence ! Vieillir, c’est la seule façon qu’on a de rester vivant. D’autant qu’on vit de plus en plus longtemps. L’espérance de vie a augmenté de plus de vingt ans au Canada en cent ans. On est en pleine révolution de la longévité et on a toutes les raisons de profiter de ce cadeau : l’allongement de la vie. Je fais partie de la génération qui trouvait vieux les quinquagénaires, je n’avais pas tort. Ma mère, à cinquante ans, était vieille pour vrai dans sa tête et dans son corps. Mais que faire devant cette peur de vieillir qui nous habite tous et toutes en ce moment ? Conscientiser et changer les mentalités ! C’est ma spécialité, il paraît.

J’attaque !


Extrait du livre Cent ans d’amour – Réflexions sur la vieillesse (2024, 168 pages, 24,95 $).

Publié avec l’autorisation de l’autrice et des Éditions Libre Expression

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