Ma parole!

La cuisine au goût de l’enfance

«Je n’ai jamais vraiment su si ma grand-mère aimait les enfants, mais je suis persuadée qu’elle m’aimait, moi, vu qu’elle prenait la peine de me préparer sa fameuse collation», écrit Geneviève Pettersen à propos de la cuisine de son enfance.

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Beaucoup de mes souvenirs ont un lien avec la nourriture. Je me rappelle les biscuits de ma grand-mère Pettersen, une femme un peu froide avec qui je n’avais pas beaucoup d’affinités. Quand j’allais chez elle, j’étais toujours intimidée par ses imposants meubles de salon en velours rouge et l’espèce de tapisserie en fil d’or accrochée au-dessus du divan. Dans mes yeux d’enfant, cette pièce était l’équivalent du château de Versailles. Il ne fallait toucher à rien. Je ne savais donc pas où me mettre pour ne pas indisposer ma mamie.

Jeune fille et sa grand-mère

Photo: Radius Images/Getty Images

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Toutes les fois que je la visitais, elle sortait une boîte en métal. Dedans, il y avait des bis­cuits au chocolat avec des raisins secs à l’intérieur et du crémage blanc dessus. J’en raffolais et, si ma mère ne m’arrêtait pas, je pouvais tous les manger. Je n’ai jamais vraiment su si ma grand-mère aimait les enfants, mais je suis persuadée qu’elle m’aimait, moi, vu qu’elle prenait la peine de me préparer sa fameuse collation. Je lui ai demandé sa recette un jour, mais ça n’a jamais goûté pareil…

Il y avait aussi les muffins de madame Larouche, notre femme de ménage. Au début, elle venait s’occuper de la maison, mais, très vite, ma mère s’est liée d’amitié avec elle. C’est elle qui me gardait quand mes parents partaient en Floride. Je me souviens de ses gâteaux, de sa ratatouille et de ses galettes d’avoine santé. C’était important pour elle de me cuisiner de la nourriture saine. D’ailleurs, je me rappelle qu’elle m’a un jour expliqué comment remplacer la cassonade par de la compote de pommes dans une recette et que ça m’avait tombé sur le gros nerf. J’étais une jeune ingrate de 12 ans, que voulez-vous ! Avec le recul, je sais que c’est parce qu’elle m’aimait qu’elle y tenait tant. Ses muffins aux bananes et à la compote représentaient tout son engagement envers moi et ma famille.

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Ma mère se faisait elle aussi un point d’honneur de cuisiner pour nous. Je la vois encore, penchée sur le volume 2 de la série Qu’est-ce qu’on mange ? à essayer de trouver un plat qui contenterait nos palais difficiles. Dans ce livre, elle avait déniché une recette de côtelettes de porc à la sauce aux framboises qui me rendait folle de joie. Je lui ai demandé de la refaire, l’autre fois. Ce n’était vraiment pas aussi bon que dans mon souvenir.

Les femmes de ma vie se sont toujours activées aux fourneaux pour les leurs. Peut-être parce qu’elles parlaient peu et que c’était leur façon à elles de donner à leurs proches tout l’amour dont elles étaient capables. Moi non plus, je ne suis pas friande des grands épanchements et autres déclarations bruyantes. Je préfère agir. Me réveiller à cinq heures du matin pour faire lever du pain de ménage ou mitonner tout un après-midi la meilleure des sauces à spaghetti. Pas une journée ne passe sans que je me demande quoi préparer pour faire plaisir à mon aînée, qui adore le chocolat et déteste le steak. Je me demande également ce que voudrait sa sœur, l’adepte des olives et de la crème à glace. Et, surtout, j’essaie de concocter des plats que mon cher et tendre appréciera lui aussi. Pour moi, la cuisine, c’est véritablement ça : une déclaration d’amour.

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Pour écrire à Geneviève Pettersen: genevieve.pettersen@rci.rogers.com
Pour réagir sur Twitter: @genpettersen
Geneviève Pettersen est l’auteure de La déesse des mouches à feu (Le Quartanier)

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