Société

Maman à toute épreuve: Ingrid Sirois

Des revers, on en connaît toutes. Mais certains sont au-dessus de nos forces – du moins, c’est ce que l’on croit. Ingrid Sirois raconte comment elle a défié l’adversité et en est ressortie plus forte.

 

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Maman de Léonard, 2 ans, veuve, 35 ans, directrice de marque chez Orage. Vit à Cap-Rouge. | Photo: Maude Chauvin

La petite histoire Le visage d’Ingrid s’illumine quand elle parle de son « JP ». « C’était une personne exceptionnelle. Un athlète professionnel qui a révolutionné le monde du ski… » Si elle l’évoque au passé, c’est que son homme, Jean-Philippe Auclair, a été emporté il y a un an et demi par une avalanche, alors qu’il escaladait le mont San Lorenzo au Chili. Il avait 37 ans. Leur fils Léonard, même pas cinq mois.

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Le coup dur Le couple venait de passer trois ans à Zurich – elle occupait un poste prestigieux en communication, lui perfectionnait sa pratique du ski-alpinisme (escalade et descente hors-piste) dans les Alpes. Tous deux étaient revenus s’installer au Québec pour la naissance de Léo. « En Suisse, c’était moi qui nous faisais vivre. Maintenant, c’était à Jean-Philippe de prendre le relais. Il sentait la pression de se réinventer en tant que skieur. »

L’athlète élabore le projet Apogée, qui consiste à filmer ses exploits sur les plus hauts sommets enneigés. Après la France et la Norvège, il s’envole pour le Chili le 24 septembre 2014. Trois Suédois l’accompagnent. Alors qu’il est en pleine ascension avec le skieur Andreas Fransson, des roches se détachent de la paroi. Le duo chute de 800 mètres pour s’écraser de l’autre côté de la frontière, en Argentine. Postés sur l’autre versant, le vidéaste Bjarne Salén et le photographe Daniel Rönnbäck filment avec désarroi leur mort en direct. Les corps ne seront jamais récupérés en raison des conditions extrêmes en haute montagne.

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La bouée de sauvetage Le lendemain matin, Ingrid apprend la terrible nouvelle. « J’ai pensé : ça ne peut pas m’arriver à moi ! Mon rêve d’une famille unie s’évanouissait. J’avais deux options : vivre une vie de merde pour le reste de mes jours ou redevenir heureuse. »

Les premiers temps, elle a l’impression d’être anesthésiée. Elle ne ressent rien, ne comprend rien. Léo, lui, semble bien s’en tirer. « J’ai demandé à ma psy comment les enfants composent avec la mort d’un parent. Elle m’a dit qu’ils n’ont pas les mots pour exprimer leurs sentiments, mais qu’ils ressentent la perte. » Ingrid fait une pause. « Il est merveilleux », dit-elle dans un sourire.

La tragédie a déclenché un formidable élan de solidarité. D’abord, son « équipe de soutien » – sa mère, sa sœur, la famille de JP. Puis, des amis skieurs du disparu, des « anges », qui lui ont promis de prendre soin de Léo. « Le jour où tu acceptes la perte, tu le laisses partir. Mais c’est dur de penser qu’il ne reviendra jamais. »

Coup de gueule La jeune femme se demande aujourd’hui si les réseaux sociaux ont une part de responsabilité dans le désir de repousser sans cesse nos limites.

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La carrière de Jean-Philippe Auclair en résumé

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